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Nous quittons LA HAVANE par les quartiers ouest Miramar et Cubanacan.
Ce
sont des quartiers résidentiels où les villas les plus cossues ont
été transformées en ambassades. Un t
Trajet de plus de
deux heures pour environ 170 km par l'autopista en direction de Pinar
del Rio.
PINAR
DEL RIO, ville de 200 000 hab. (anciennement Nueva Filipa fondée au
XVIe s.). Important centre de la culture et de la transformation du tabac.
Surnommée la ville des chapiteaux pour ses nombreuses colonnes corinthiennes
et ioniques de ses constructions.
La
ville est également connue pour sa liqueur locale, ''la Guayabita''.
A proximité de Pinar del Rio, dans le village
de Guardelaria, nous visitons la petite fabrique de cigares, la Fabrica
de Tabacos Francisco Donatien, installée dans une ancienne prison.
Ce
serait l'une de deux seules fabriques ouvertes à la visite dans la région,
ce qui expliquerait l'embouteillage sur lequel nous arrivons, les autres touristes
ayant été plus matinaux.
Le
cur du cigare s'appelle la tripe (tripa) et est constitué
de feuilles roulées à la main par le torcedor. Elle est maintenue
en place par la sous-cape (capote) tandis que la cape (capa) forme
l'enveloppe extérieure d'aspect lisse et velouté. La ''tête''
est enveloppée dans une rondelle de feuille de tabac collée à
la colle végétale (elle sera coupée avant d'allumer le cigare).
Depuis 1830, on ajoute une bague qui enserre le milieu du cigare.
Les meilleurs
Havanes sont fabriqués dans cette région où pousse le fameux
tabac noir, le puro.
A l'époque coloniale, la fabrication de
cigares était un privilège royal (établi en 1717) contre
lequel les planteurs s'élevèrent bientôt. Les cigares de Cuba
étaient exportés en Espagne vers les ports de Séville et
de Cadix.
Curieusement,
les photos sont interdites dans ce petit atelier exigu alors qu'il n'y a aucune
technologie extraordinaire ou grand secret de fabrication à découvrir
dans un tel lieu.
Donc comme pour les Cubains, il nous reste à contourner
la règle!
L'usine
comprend 115 employés. Les rouleurs (torcedores) fabriquent quotidiennement
de 80 à 110 authentiques cigares de ...Trinidad!
La journée
est de 8 heures. Pour en rompre la monotonie et accessoirement, assurer l'endoctrinement,
un employé est chargé de faire la lecture (presse, livre) dans l'atelier.
Ici, on est loin des grandes manufactures de La Havane qui ont un millier d'employés
et disposent de services intégrés (dentiste, manucure...).
Le
travail est totalement manuel et il faut une bonne expérience pour que
la tripe fasse le calibre en diamètre et en longueur, que la robe soit
bien lissée. Un contrôle est effectué et certains cigares
sont déclassés.
En prime, par jour de travail, les employés
bénéficient de deux cigares qu'ils peuvent vendre. Sur le lieu de
travail, ils n'ont pas le droit de le faire mais des employés en pause
ne se gênent pas pour faire des propositions.
Passage obligé par
la petite boutique de vente. On nous met en garde contre les vendeurs de cigares
de contrefaçon (mauvais cigares avec souvent une seule feuille d'enveloppe
et même parfois de bananier!) qui sans aucune discrétion proposent
leur marchandise dans la rue ou sur le pas de leur porte à quelques mètres
de là.
Nous prenons une route secondaire en direction
de Viñales, village distant de quelques 20 km.
Certains d'entre nous souhaitant faire bénéficier
les jeunes écoliers cubains de quelques fournitures scolaires, Doris repère
bientôt dans le village de Auba une petite école de campagne*
dans la cour de laquelle est érigé un buste de l'inévitable
José Marti...
La jeune maîtresse est totalement déstabilisée
par cette irruption totalement impromptue et surtout ne se sent pas habilitée
à nous recevoir sans avoir obtenu l'autorisation. Mais au fait, avant de
critiquer, essayez donc de faire ce genre de chose en France, il faudrait au moins
remonter à l'inspection académique sinon au rectorat...
L'argument qui la convainc:
si elle refuse "vaut-il mieux alors donner cahiers et crayons à de
enfants de rues non scolarisés et qui en font un trafic?".
On
peut en profiter pour jeter un coup d'oeil dans les classes. Tient donc, pourquoi
ce petit garçon resté tout seul à jouer dans une classe et
de surcroît parfaitement indifférent aux visiteurs? Pourtant il ne
semble ni puni, ni malade...
On peut remarquer que par rapport aux autres
écoles des pays du Tiers-Monde, un minimum d'équipement existe dans
cette école: bureaux, chaises, livres, jeux et jouets, téléviseur,
, matériel pédagogique..
Pour
nous remercier, les enfants s'improvisent en chorale et entonnent une longue chanson
qui commence par quelque chose du genre "Nous sommes nés, nous
avons le droit de grandir, le droit d'être heureux...".
Une demi-heure de route à travers un paysage ponctué de reliefs en pains de sucre, les fameuses mogotes.
Le site est inscriteau Patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1999 .
Sans
nous y arrêter, nous
passons devant l'entrée de la petite ville de Viñales
afin de nous rendre à la Casa de Benito** qui cultive les plans
de tabac et en sèche les feuilles dans son "despalillo"
dans la campagne de Viñales.
Le
procédé de récolte qu'il applique semble plus expéditif,
dans la mesure où il sectionne la tige du plant par tronçon portant
les deux feuilles appariées plutôt que de détacher chacune
et de les attacher par un fil (cf. ci-contre).
Le
TABAC (ou plutôt cohiba de son nom indien devenu aussi l'une
des quatre grandes marques).
Les Indiens mélangeaient le tabac à
des plantes hallucinogènes pour un usage médicinal ou lors de rites
chamaniques.
Les autorités coloniales espagnoles établirent un
monopole royal en 1717.
Cette
plante fragile pousse en trois ou quatre mois pendant la saison d'hiver (ce qui
est bien relatif sous les tropiques), disons après la saison des ouragans,
entre novembre et avril. Le Criolo pousse en pleine terre et ses premières
feuilles sont les plus aromatiques tandis que le Corojo plus délicat et
dont on tire la cape est cultivé sous serre. Lorsque le plant se développe,
il est étêté afin d'empêcher la floraison.
Le
séchage dure trois mois. Cela explique que les séchoirs ravagés
par les ouragans de l'an dernier étaient heureusement vides alors (un moindre
mal!). Les feuilles récoltées sont d'abord mises en bottes pour
être séchées à l'horizontale sur un système
de lattes formant claire voie en plein air. Puis elles sont suspendues verticalement
dans de séchoirs, ces sortes de hangars bardés de feuilles de palmiers
afin que l'air circule, pendant un mois et demi à deux mois. Il faut veiller
au bon degré d'hygrométrie et à la bonne température.
Avant d'être travaillées dans les manufactures de cigares, elles
seront humidifiées afin de ne pas être trop friables.
Après la fin de la récolte, en été, on remplace dans les champs le tabac par du manioc, des haricots, de maïs ou des topinambours.
Benito est un personnage haut en couleur, photogénique et cabotin à souhait, ce qui lui permet d'être une célébrité mondiale (aux USA notamment). Après la visite de son séchoir où il roule quelques cigares et les vend par lots de cinq, on peut également visiter sa maison et sa basse-cour (c'est l'heure du déjeuner pour ses volailles dindons et poulets...
VIÑALES,
petite ville de 30 000 hab., fondé en 1607, doit son nom aux vignes plantées
ici au tout début du XVIIe s. par un colon canadien.
Cette
ville est blottie au creux d'une superbe vallée ponctuée de mogotes,
des reliefs karstiques en forme de pains de sucre de la Sierra de los Organos
("les Orgues").
Palmiers,
pins et orchidées sauvages en font aussi l'attrait de ce paysage de l'ouest
de Cuba
Très
court trajet pour nous rendre au restaurant installé au pied de l'extraordinaire
Mur de la Préhistoire**, sur le flanc de la mogote
des Deux Soeurs (Las Dos Hermanas).
Repas
traditionnel criolo sous une paillotte avec animation musicale tout aussi
traditionnelle. En revanche, ce qui l'est moins et attire beaucoup plus l'attention,
c'est le repas que fait un serpent au dessus de nos têtes. Nous assistons
à la longue agonie d'une sorte de grenouille qui crie longtemps jusqu'à
ce qu'elle soit avalée.
Sur ces propos, Bon Appétit quand
même!
Pour nous remettre de ces émotions, quelques centaines de mètres
à pied pour atteindre la base de l'étrange falaise peinte du Mur
de la Préhistoire qui retrace le développement de l'évolution
de l'homme jusqu'au socialisme!
Cette immense fresque, commandée par
Fidel Castro, qui mesure 120 m. de haut et 180 m. de large fut exécutée
sur le flanc d'un mogote entre 1959 et 1962 sous la direction du célèbre
peintre mexicain Diego Rivera (auteur des fresques réalistes du Palacio
Nacional à Mexico) par le peintre cubain Leovigildo Gonzales assisté
d'une dizaine d'autres artistes.
Elle a été restaurée
en 1980 et, semble-t-il, plus récemment dans sa partie droite. Ce n'est
que de près que l'on se rend compte de la technique de réalisation.
D'abord les peintres sont assis sur un siège rudimentaire suspendu au flanc
de la falaise. Ensuite, de loin, on ne perçoit que des aplats de couleurs,
alors que de près on observe que le relief de la paroi a été
exploité (comme les peintures rupestres dans les grottes préhistoriques)
et surtout on découvre une alternance de stries horizontales noires et
de stries colorées. Quelle est la finalité de ces stries sombres ?
Trois kilomètres seulement et nous voici à Viñales.
Pendant trois quarts d'heure, nous allons découvrir à pied cette bourgade rurale dont la rue principale est cependant interdite aux carrioles et aux tracteurs. Les rues sont bordées de maisons basses couvertes de tuiles, maisons simples bien que souvent les façades soient en retrait sous des portiques à colonnes.
Visite
du Foyer Maternel (Hogar Materno). Une seule femme s'y trouve hébergée
en ce moment.
Les futures mères viennent se reposer dans ce type d'établissement
pendant les deux mois précédant l'accouchement (après, elles
ont un congé d'une année).
On
y fait la promotion de l'allaitement maternel avec le slogan "Allaiter
c'est Aimer". Un peu de propagande aussi avec une longue citation de
Che ("[...] construire plus et promettre moins [...] recevoir moins
et donner plus [...] ").
Donc une politique familiale développée
mais à côté de cela, l'anesthésie
péridurale pour réduire les douleurs que nous évoquons n'est
pas pratiquée dans ce pays et son existence est même ignorée
des employées.
Coup
d'oeil dans une petite tienda, une boutique à prix libres mais en monnaie
locale. A défaut d'y faire notre marché, profitons-en pour faire
un inventaire à la Prévert.
La bouteille d'eau de source de 1,5
litre est proposée à 25 CUP (environ 1€, donc plus chère
que dans le supermarché de La Havane où elle coûtait 0,65€).
En bouteilles de 2 litres le TuKola et autres boissons gazeuses sont à
32 CUP, la bouteille de vin local à 35 CUP, la cannette de bière
Mayabe à 38 CUP, les paquets d'amuse-gueule apéritifs
de 6 à 18 CUP, les bouillons de soupe en sachet Maggi à
base de poulet, porc fumé, bacon ou chorizo et la poudre de cannelle à
2,5 CUP, sachets de Sauce Mayonnaise et de Sauce Russe à 10-12 CUP,
paquet de gâteaux secs à 4 CUP ou encore paquet de bonbons à
la menthe à 6 CUP...
Quoi
d'autre à signaler? Belle américaine, temple baptiste, un restaurant
tout bleu en cours de restauration où nous aurions dû déjeuner...
Une fois de plus, on peut se rendre compte des ravages d'une alimentation deséquilibrée
(excès de sucre) dans la population féminine moins exposée
aux gros travaux qui brûlent l'excès d'énergie apportée
par cet aliment.
Trois kilomètres à nouveau pour nous permettre de
profiter du panorama depuis la terrasse de l'hôtel Los Jasmines
(ou Jazmines?). On a le souffle coupé. D'abord parce qu'il fait un vent
de tous les diables malgré un ciel bleu ponctué de légers
cumulus mais surtout par la beauté du paysage.
Celui des mogotes, ces reliefs karstiques
en forme de pains de sucre.
S'il
se trouvait ici une rivière,
on penserait presque aux paysages chinois comme
dans de la région de Guilin ou à ceux de "l'Halong terrestre"
au Vietnam.
Les
mogotes sont des reliefs karstiques
en forme de pains de sucre formés dans la Sierra de los Organos ("les
Orgues") que l'érosion a taraudé en y creusant grottes
et cavernes (grottes de l'Indien, St Michel, St Thomas
...).
Les reliefs
karstiques sont des formes de paysages particuliers dus à l’action de l'eau qui
s'infiltre dans la terre ou à l'eau qui se déverse des sources dans certains
types de sols. Le mot karst vient du nom d'une région côtière de Yougoslavie où
l'on voit des formes de reliefs particuliers (dolines, cavernes, ponts naturels,
pertes de rivières, etc.). Plutôt que de couler en surface comme dans un système
fluvial, l'eau s'y écoule en passant par un réseau souterrain de grottes de dissolution
dont, lorsqu'elles deviennent trop vastes, la voûte finit par s'écrouler.
La formation des reliefs karstiques est restreinte aux régions constituées
de roches relativement solubles, surtout le calcaire, les dolomies (roches carbonatées),
le gypse… et elle a été favorisée par une présence d’eau en abondance, eau froide
à certaines périodes donc eau plus riche en gaz carbonique et donc aussi plus
acide (acide carbonique). Le karst représente 20% des terres émergées.
Retour vers la capitale.
Soit près de 200km et deux heures et demie
de trajet.
L'autopista
nous offre un spectacle autoroutier peu banal mais devenu habituel ici: rares
ponts enjambant l'autoroute (à l'inverse on peut voir aussi un pont mais
pas de route au-dessus!) mais plutôt des franchissements à niveau, camion
ou carriole circulant à contresens (!), tracteurs, véhicules en panne un
peu partout, piétons, voyageurs des transports en commun inséparables
de leurs amarillos attendant un véhicule (et au besoin tendant des
billets pour prouver de leurs moyens de s'acquitter), vendeur de chapelets d'ail
planté là, en plein milieu de la chaussée.
Par endroit
il n'y a aucun terre-plein car certains tronçons sont aménagés
pour servir de piste d'aviation en cas de guerre... Prévoyants ces Cubains!
De
nombreuses réserves d'eau ont été aménagées
et des kayakistes en profitent. On peut aussi observer l'étrange palmier
ventru, typique de cette région. On n'en tire rien si ce n'est qu'il
sert dans la complantation en protégeant des cultures au sol.
Puis ce sont les faubourgs de La Havane, dans le quartier agréable et arboré de Miramar, avec la très laide ambassade de Russie, et nous retrouvons Vedado et le Malecon qui essuie une tempête sous le soleil couchant.
CUBA