| ||||
| ||||||||||||||
Etape
précédente : Mandalay |
Levés dès 6 heures, nous quittons l'Emerald Land une heure plus tard. C'est déjà la procession des moines en train de collecter l'aumône près d'un petit marché installé en bord de rue.
Puis nous retrouvons à nouveau l'embarcadère sur les rives de l'Irrawaddy. Des bagagistes effectuent le transbordement acrobatique de nos valises à bord du bateau car c'est un autre bus qui nous attendra à Bagan...
Nous allons naviguer avec le même bateau qu'au cours de la matinée précédente mais, cette fois-ci, c'est pour la journée entière. Plus chanceux que d'autres voyageurs partis en novembre avec le même voyagiste, notre bateau n'aura pas à prendre des passagers d'un autre bateau avant de tomber lui-même en panne!
Nous
appareillons à 7h30 pour descendre la rivière sur quelque 200km
(on trouve curieusement plusieurs fois mentionnée la distance de 330km).
Il fait encore bien frais à cette heure matinale...
Je
présente à nouveau le bateau qui nous a déjà transportés
dans notre excursion d'hier matin. C'est un
vieux bateau tout en bois, une sorte de jonque à moteur, réservé
à notre petit groupe de 30 qui occupe à la fois le pont supérieur
(en partie bâché) tandis que le pont couvert va nous servir aujourd'hui
de salle à manger rustique... alors
que deux ou trois fois plus de passagers locaux pourraient sans doute y trouver
place.
Premières
heures de navigation intéressantes: petit bateau traversier surchargé
d'une quarantaine ou d'une cinquantaine de passagers debout, trafic fluvial divers,
colline de Sagaing et aperçu de quelques unes de ses 600 pagodes
dorées (dans la page consacrée à Mandalay, nous
avons évoqué ce site non visité), ponts d'Ava,
villages de pêcheurs, zébus au bain avec leur charrette...
| ||
En fonction du spectacle à observer et de notre recherche d'ombre, nous nous déplaçons d'un bord à l'autre sur le pont supérieur sans avoir conscience qu'un soutier veille au niveau du pont couvert à ce que l'embarcation de prenne pas de la gîte. Comment? Tout simplement en déplaçant nos valises sur le bord opposé!
Nous nous faisons allégrement dépasser par des bateaux en acier, plus imposants et plus rapides, qui doivent transporter 60 ou 80 passagers (ou plus?) en 10 heures entre Mandalay et Bagan. Quant aux slow-boats, les bateaux-bus locaux, partis très tôt le matin pour assurer des escales dans les villages en14 heures de trajet, ils nous avaient précédés malgré tout et nous ne les rattraperons pas! Nous serons dans la moyenne avec 12 heures de trajet.
Midi, c'est l'heure
d'un repas simple mais bon et copieux : soupe et riz, 3 plats et fruits
en dessert (banane et orange). Le repas nous est servi au niveau du pont couvert
qui comme par enchantement s'est transformé en salle à manger avec
des tablées de 8 personnes...
Su Su
vigilante à ce que les restaurants ne nous servent pas de crudités,
nous (r)assure qu'il n'y a pas de risque à en consommer sur le bateau car
les légumes y sont lavés à l'eau en bouteille (purifiée)!
D'ailleurs, certains d'entre nous ont été témoins des préparatifs...
N'aurait-il pas été possible d'abréger cette lente navigation en rejoignant le plancher des vaches du côté de Sameikkon ou de Myingyan?
L'après-midi se poursuit tranquillement et oisivement, un peu monotone, occupés à remplir des grilles de jeu, à lire, à papoter, à se dorer au soleil ou à piquer un petit somme... jusqu'à ce que Sylvie sonne le branle-bas de combat car cette vie semble bien trop monotone pour cette animatrice née. Nous sommes mis au défit de retrouver les prénoms des uns et des autres et de se souvenir de qui vit avec qui dans les couples... On a la mémoire pour ça ou on ne l'a pas du tout comme on pourra le constater...
Que
se passe-t-il pendant ce temps là autour de nous ?
Villages comme assoupis
autour de leur petite pagode, caravane de buffles d'eau montés par leur
bouvier, sur l'eau: barques de pêcheurs, chalands et radeaux géants...
A tribord, confluence avec la rivière Chindwinn.
17 heures, le soleil approche de l'horizon, juste à la proue du bateau
sur cette partie de l'Irrawaddy où nous faisons cap vers l'ouest. C'est
parti pour une heure de spectacle sur un coucher de soleil que chacun essaie
de mettre en boîte avec plus ou moins de sens esthétique, en jouant
avec le contre-jour sur un pont métallique qui se profile juste au moment
idéal.
| |||
| ||
18h15,
il fait totalement nuit et nous avons encore une heure de navigation. Certains
s'inquiètent un peu du fait de naviguer dans de telle conditions sur un
bateau qui n'a ni instruments ni signalisation et sachant que nous sommes susceptibles
de croiser d'autres embarcations dans les mêmes dispositions.
Inquiétude
inutile puisque nous arrivons à bon port à 19h15. Ayant
échappés à la toujours possible panne, il nous a fallu 12
heures pour parcourir les quelque 190 ou 200km qui séparent Mandalay de
Bagan et dans ce sens le courant est porteur! Nous sommes sans doute les bons
derniers.
"Quais" toujours aussi rudimentaires de Aye Yav,
le port de Bagan, et les bagagistes doivent porter nos valises sur quelques 200
mètres jusqu'au bus.
BAGAN,
ancienne capitale du Royaume de PAGAN
(849 à 1287)
(liste indicative du Patrimoine Mondial de l'UNESCO
établie en 1996)
Nous passons dans nos chambres à l'hôtel Thazin Garden dans le Nouveau Bagan (Bagan Myothit), au sud de l'Ancien Bagan. C'est l'hôtel le plus confortable et le plus agréable que nous aurons eu dans le circuit: chambres propres, spacieuses, bien décorées (ombrelles, lampions).
Autre
surprise plutôt agréable à première vue, le périmètre
de l'hôtel est construit dans la zone archéologique avec des
stupas autour et même un dans son périmètre! Le dîner
est même au pied de ce dernier... Dîner auquel des moustiques s'invitent.
Mais réflexion faite, est-il normal qu'un riche homme d'affaires de
Yangon s'approprie ainsi un patrimoine historique? Cela me rappelle l'hôtel-hacienda
Posada Chichen-Itza qu'un américain avait installé en plein
site de Chichen-itza au Mexique.
Autre mauvaise surprise, un monsieur fait
s'exhiber trois "femmes-girafes" (sous-groupe ethnique Padaung des Karens)
en dehors de tout contexte puisque l'on est loin de leur région. Une seule
à l'air authentique. Leur chant triste est à l'avenant de ce qu'exprime
leur visage... Assises sur des tapis, quand elles ont fini de chanter, lune
tisse, les autres vendent des bijoux....
Bonne
nuit à l'hôtel avec cependant la mélopée des moines
qui commencent à réciter les soutras vers 5 heures 30 et il semble
que ce soient les nonnes qui prennent le relais vers 7 heures mais là il
n'y a plus de dommage puisque le lever était fixé à 6h pour
un départ à 7h car nous aurons un programme très chargé.
Point
d'orgue du voyage qui ne peut laisser indifférent, Bagan ou
Pagan, fondée par les Möns en lan 107, se trouvait par la suite
dans le royaume des Pyus jusqu'à leur absorption par les Bamars qui choisirent
alors de créer ici la capitale du royaume birman au IXe s. puis ce
fut la capitale du Premier Empire Birman entre le XIe s. et le XIIIe siècle.
Le site eu la chance de ne pas être détruit par les Mongols lors
de leur invasion en 1287.
La population profite de la notoriété
du site, 85% vit du tourisme, ce qui est une chance car l'agriculture (arachide,
sésame) n'est pas très productive dans cette région au sol
sableux et au climat assez aride.
UNE MAJESTUEUSE VUE D'ENSEMBLE
Considéré
comme l'un des sites archéologiques majeurs en Asie du Sud Est, au même
titre que Angkor Wat au Cambodge ou Borobudur à Java, le site de Pagan
défie le temps et témoigne de l'attachement d'un peuple à
la foi bouddhique et de sa grande ferveur religieuse. Les ruines s'étendent
sur 41km² (on peut trouver aussi 52km²?) sur la rive gauche de l'Irrawaddy.
En 1990 les autorités ont fait place nette en expulsant les 5200 personnes
qui résidaient dans le site en habitat diffus.
A Bagan (ou Pagan), nous allons parcourir un site extraordinaire puisque l'on y dénombre plus de 2 400 pagodes (on peut lire aussi, modestement, 2219 pagodes ou, beaucoup plus ambitieusement, 5 000 mais alors peut-être compte-on alors séparément chaque stupa et pagodon et la moindre ruine à peine visible ?) et édifices religieux. Mais c'est là une infime partie de la richesse monumentale qui fut celle de ce site qui en comptait 13 000 au IIe s. Beaucoup ont disparu suite aux crues de l'Irrawaddy et aux séismes (celui de 1975 provoqua encore des dégâts). C'était quasiment le seul lieu touristique visité avant 1996, lorsque les visas touristiques n'étaient accordés que pour une semaine.
On
reste stupéfait devant un site d'une telle splendeur
non inscrit sur la Liste du Patrimoine Mondial de l'UNESCO (seulement
sur la liste indicative de 1996).
Cela résulte en autre, d'un
bras de fer avec les autorités qui ont voulu procéder à leur
guise à des aménagements discutables (restaurations fantaisistes,
terrain de golf, tour d'observation de 61m de hauteur) sur le site, au mépris
des règles de bonne conservation du patrimoine... si bien que les experts
et archéologues internationaux se sont retirés en 1993. La junte
a aggravé la situation, en entreprenant la reconstruction d'un palais.
Mais quand même, lorsqu'on voyage, on observe bien d'autres dérives
sur des sites qui figurent pourtant en bonne et due place sur la liste...
Une
vue d'ensemble exceptionnelle
depuis la
Pagode Dhammayazika
| |||
Su Su a eu la judicieuse idée de faire commencer la visite par la Pagode Dhammayazika, située au sud-ouest, ce qui offre l'avantage à cette heure matinale de voir s'éclairer les autres pagodes. Spectacle féerique auquel prennent part également les passagers de 5 montgolfières "BB - Balloons over Bagan") qui, venant du nord, évoluent en notre direction.
On
ne nous pas proposé cette option, hors de prix au demeurant, avec 290$
en haute saison (il n'y a pas de vols dans les saisons chaude puis pluvieuse,
de début avril à fin septembre) pour moins de 5 personnes.
Il est vrai qu'ici il n'y a aucune concurrence contrairement à ce qui se
fait dans d'autres régions du monde, comme en Cappadoce (au moins 3 compagnies)
à un tarif moitié moindre, sans parler de Louxor encore bien moins
cher (50 à 80€). Bref, ici, ce sont carrément les tarifs européens!
A qui cet argent profite-t-il? A la société anglaise exploitante
ou, comme d'autres le suggèrent, à la junte?
A
perte de vue, stupas, pagodes et monastères par milliers dont la plupart
remontent aux XIe-XIIIe s., émergent ici et là.
Dans
un regard à 180°, on embrasse quelque 50 édifices ou groupes
d'édifices noyés dans une brume romantique à souhait. Cette
brume masque à peine la malheureuse tour d'observation installée
par les autorités au nord de la zone. En revanche, on domine un monastère
tout proche.
Après cela, intéressons nous un peu à la
pagode sur la terrasse de laquelle nous sommes grimpés. Cet édifice
imposant est original par sa base pentagonale, en rupture avec l'architecture
d'inspiration indienne à plan carré. Du coup, ce lieu de culte de
la toute fin du XIIe s. intègre un cinquième Bouddha, outre
les trois précurseurs et le Bouddha historique, il s'agit du Bouddha de
l'Avenir ou du Futur, Metteya.
Sur les côtés des terrasses pentagonales
on peut admirer de superbes carreaux de céramiques présentant des
scènes bouddhiques mais dans un style nettement hindouiste (postures des
personnages). De ces terrasses sortent également de jolies gargouilles
à forme d'oiseau.
La cloche du stupa a été restaurée par les autorités mais on voit que le travail serait à reprendre. Non seulement la dorure disparaît mais le support en laque se décolle en grandes plaques. Su Su nous explique qu'en effet pour protéger le substrat en brique et éviter que l'humidité ne décolle l'or, une sous couche de laque doit être appliquée.
Fête de prise de robe des Novices (Shinpyu, cérémonie de "Noviciation") et de percement d'oreilles des filles
Prenant la direction du village de Myinkaba (ou Myin Ka Par), au bout de 10 minutes
de route nous tombons sur les préparatifs de fête villageoise. Quelle
aubaine!
Un chapiteau doré a été installé et on voit
qu'un défilé se prépare. Il
est vrai que nous sommes en plein dans la période du Festival de la Pagode
Ananda qui qui se déroule du 5 au 31 janvier (avec des chants, danses, théâtre,
caravanes de chars à boeufs...).
| ||
Su Su nous explique rapidement qu'il s'agit d'une Fête de prise de Robe des Novices comme il s'en déroule épisodiquement dans les villages. On est au deuxième jour de fête, la veille avait eu lieu le banquet auquel les familles avaient convié parents et amis tandis qu'un repas est offert aux moines. Aujourd'hui a lieu le défilé solennel tandis que l'après-midi les jeunes novices, entre 5 à 15 ans (d'autres sources réduisent la fourchette: entre 9 et 12 ans) vont se rendre au monastère où on va leur raser les cheveux, et leur faire revêtir leurs habits après une toilette. Ils passeront quelques jours (une semaine) au monastère avant de retourner dans leur famille. Ce n'est qu'à 20 ans que se fait l'entrée durable, voire définitive au monastère.
Nous assistons aux derniers préparatifs avec rectification de coiffure et de maquillage à tel point que l'on a du mal à distinguer les garçons des filles. Ambiance de première communion en somme. Tout le monde est très ému, enfants et mamans. Fiers, les papas et mamans et nettement moins les enfants!
Les
garçons sont vêtus comme des princes pour rappeler la jeunesse du
Bouddha, fils de roi. Ils montent un cheval (s'ils étaient riches ce serait
sur un éléphant tandis que dans les villes ils sont sur le plateau
d'un pick-up) tandis qu'un "serviteur" les abrite sous une ombrelle
d'honneur. Mais notre attention est attirée par de tous petits bouts de
choux et même par la présence de fillettes. En fait pour les plus
petits garçons, ce défilé n'est qu'une sorte de répétition
festive tandis que les petites filles, pour ne pas être en reste, sont déguisées
en princesses et auront la cérémonie des oreilles percées
afin de pouvoir porter leurs premières boucles d'oreilles. Ces demoiselles
sont véhiculées non pas dans des carrosses mais dans des charrettes
tirées par des paires de boeufs ou plus exactement de zébus.
Le
cortège mis en place se déplace dans l'ordre suivant, pour autant
que je m'en souvienne: les grands-pères en voiture décorée,
les grands-mères également en voiture puis, à pied, la reine
de beauté, "le sponsor", les parents, les jeunes filles portant
des offrandes et les huit objets indispensables pour lentrée au monastère,
les princes novices sur leur monture et les princesses en charrettes. Un véhicule
assure également la sonorisation et est accompagné de danseurs.
Cet intermède aussi plaisant qu'imprévu nous a occupés une
heure.
Nous
reprenons la route pour un court trajet de 10 minutes afin de nous rendre à
l'atelier de laque Maung Aung Myin, au village de Myinkapar. Nous allons
y passer près d'une heure.
La confusion la plus totale règne
sur l'emploi des genres. Wikipédia
emploie "le" pour désigner la substance et "la" pour
désigner la technique mais sans rester cohérent par la suite. Le
site http://www.ici-japon.com
donne une explication diamétralement opposée...
Bref passons
sur ces chinoiseries.
Une
présentation très intéressante de techniques nous est faite
par une jeune femme parlant parfaitement le français qu'elle a étudié
en Alliance Française. Sans rentrer dans les détails, voici quelques
éléments d'information que j'ai pu retenir. Trois types de supports
sont susceptibles d'être laqués. Le plus délicat et donc le
plus coûteux porte sur les récipients de vanneries en crin de cheval
qui conserveront leur souplesse. Les récipients en vannerie de lamelles
de bambou constituent la catégorie la plus courante (bols). Enfin, les
panneaux de bois sont utilisés pour les objets comportant des angles (plateaux,
boîtes carrées). La gravure de motifs minuscules exécutés
à main levée nécessite une extrême minutie. Pour y
parvenir, il faut suivre, parallèlement à l'enseignement scolaire,
un apprentissage de 5 années qui commence par "des pages d'écriture"
ou plutôt de calligraphie sur des cahiers!
La laque (ou le laque) est
la résine du laquier qui, appliquée à plusieurs reprises
en minces couches, a pour effet de rendre imperméables les objets qu'elle
recouvre. De plus elle résiste aux insectes et garde en toutes occasions
sa flexibilité. On peut en faire un usage alimentaire et elle supporte
le lavage.
Pour les objets complexes, le travail peut se répartir sur
sept mois car entre chaque application, il faut laisser un temps de séchage
de cinq jours, en sachant que les faces internes et externes ne peuvent pas être
réalisées en même temps. Les couleurs (à base de pigments
minéraux) déjà appliquées sur les laques décorées
doivent être protégées par une gomme d'accacia lorsque l'on
applique une nouvelle couleur.
Idée prix? Une boîte à
bétel souple (sur base en crin) peut coûter 130$, d'ailleurs ces
précieux objets sont présentés en vitrine!
| ||
Etape suivante, au nord du site, près de la ville de Nyaung U (au nord-est de Bagan), pour la visite de la Pagode Shwezigon, au dôme recouvert d'or et dont l'origine remonte au milieu du XIe s. Avec ses 61 mètre de hauteur, contre les 98 de la pagode Shwedagon (Rangoun), elle reste quand même imposante. C'est la quatrième pagode d'or ("shwe" signifie "or") la plus sacrée du pays après Shwedagon de Rangoun, Shwemawdaw de Bago (ou Pegou) et Mahamuni de Mandalay. Elle a été élevée à l'initiative de Kyanzittha, fils de Anawrahta (le fondateur du Premier Empire) pour accueillir une copie de la dent du Bouddha de Kandy (au Sri Lanka). L'emplacement fut choisi par son éléphant blanc qui s'agenouilla ici alors qu'il ramenait un os frontal du Bouddha.
Chacun des quatre escaliers d'accès conduit devant un Bouddha de bronze
de 4m de haut et creux (obtenu par martelage et non par coulage) datant du XIIe s.
Sur les côtés des trois terrasses carrées sont insérées
des plaques de céramique émaillée relatant les 547 vies antérieures
du Bouddha tandis qu'aux angles et au milieu de chacun des côtés
veillent les huit animaux planétaires dédiés à chacun
des huit jours que compte la semaine birmane... Le stupa est moins élancé
que celui de Shwedagon que l'on a admiré à Rangoun. Au pied s'élèvent
des bols à aumônes en pierre, des arbres métalliques (la région
est aride), des temples et pavillons. Côté est, au pied du stupa,
une petite cavité de 10cm de diamètre remplie d'eau fait miroir
permettant de voir le reflet de l'ombrelle sommitale, le hti, sans
renverser la tête, détail important pour un souverain qui ne peut
pas prendre le risque de voir sa couronne tomber à terre...
A
l'est, un petit escalier conduit à un temple où sont vénérés
deux nats, les "esprits" protecteurs de la pagode, un
père et son fils. Paradoxe bouddhico-birman, la tradition veut que le fils
soit plus âgé que le père car ici on considère que
c'est le temps à partir de la conversion qui compte, or le fils s'était
converti au bouddhisme avant son père. CQFD.
Nous ignorerons le temple
dédié aux 37 nats mais nous passerons dans divers petits temples
: Bouddha assis et ses 5 premiers disciples, un Bouddha "moderne" debout,
avec manteau brodé et couronne, Bouddha couché, personnages rencontrés
par le jeune prince Siddhartha Gautama: le vieillard, le malade, la mort et un
moine mendiant, rencontre qui scellera le destin du futur Bouddha, le faisant
renoncer au monde, aux richesses et même à sa famille...
Pas le temps d'aller de faire un tour au marché de Nyaung Oo !
Un court trajet nous amène à la Pagode Gubyaukgyi (ou Kubyaukgyi ou Gubyaukgne), près du village de Wetkyi-in. Ce temple de style Môn du début du XIIe s., ressemble par son sikkhara (sa flèche) au temple Mahabodi de Bodh Gaya en Inde (le lieu où le Bouddha reçut l'illumination). On perçoit l'influence des marchands tamouls qui parcouraient alors la contrée. Un mandapa (porche) orienté à l'est précède un vestibule couvert de peintures. Peu éclairé, on a l'impression de rentrer dans une grotte. Le Bouddha assis est dans la posture de "prise de la terre à témoin". Les murs portent des fresques (544 ou 547) d'origine, les Jakatas relatant les vies antérieures du Bouddha. Au-dessus on peut voir des représentations de bodhisattvas, des sortes de saints ayant atteint l'Eveil qui sont vénérés dans le bouddhisme Mahayanan ("Grand véhicule"). Une partie a été prélevée par un archéologue allemand au XIXe s. pour être exposée au musée de Hambourg. La voûte est ornée de médaillons très ouvragés portant au centre une image du Bouddha assis.
Pour protéger ces précieuses peintures, en partie restaurées par l'Unesco, les photographies sont interdites, même sans flash. En toute bonne foi n'ayant pas vu le panneau, je me suis fait réprimander...
Petit trajet et il est 13 heures; l'étape restaurant Sunset Garden, sur le rivage de l'Irrawaddy s'avère bienvenue.
Après le repas, vers 14 heures, le bus nous conduit au village de West Pwasaw, Su Su proposant cette visite à la place de celle de la Pagode Htilominho (début du XIIIe s.) qui figurait au programme. Sans doute a-t-elle peur que nous saturions d'autant qu'on l'apercevra lors de notre promenade de fin d'après-midi en "calèche" ou plutôt en carriole. La visite s'effectuera en une demi-heure, de 14h30 à 15h.
Dans ce village aux maisons sur pilotis, on peut voir différentes activités: séchage des jujubes, hachage de fourrage selon deux techniques différentes... Activités de type artisanal également: filature, vannerie (en crin) pour laquage... Femme portant un fagot sur la tête ou une autre femme se lavant les cheveux tout en berçant un enfant... Visite de l'intérieur d'habitations... Le sol est recouvert de tatamis en bambou tressé. De même, les lits sont constitués d'un simple plancher surélevé.
Une
affiche met en garde, et les habitants et les touristes occidentaux, contre la
traite des êtres humains et la pédophilie. Ce document fait allusion
à un Allemand qui a été emprisonné après un
acte répréhensible commis ici l'an dernier.
Visuellement,
on peut facilement distinguer les habitations des villageois les plus riches:
les claies de bambous servant de murs sont neuves et présence de paraboles
pour la TV. Certaines maisons sont construites de façon moderne, directement
sur le sol, ce qui n'est pas forcément la meilleure solution en cas d'inondation.
| ||
| ||
Une demi-douzaine de kilomètres plus loin et une demi-heure plus tard nous débarquons du bus pour visiter la Pagode Ananda, bijou de l'architecture birmane, le plus célèbre, le plus prestigieux de Bagan et le plus vénéré avec ses statues de Bouddha et ses peintures datant du XIIIe siècle dépeignant la vie quotidienne dans le royaume. Même des religieuses catholiques en habit gris sont en visite dans ce "temple païen".
C'est
un temple de style himalayen bâti au tout début du XIIe s.,
surmonté d'un sikhara recouvert d'or reconstruit après
le séisme de 1975 au-dessus de trois terrasses. Mais un ravalement des
quatre façades blanches passées à la chaux serait déjà
nécessaire.
Si l'on fait abstraction des quatre galeries qui donnent
à l'édifice un plan en croix grecque, la construction s'inscrit
pratiquement dans un cube parfait: base carrée de 53m de côté
et pointe de la flèche dominant la plaine du haut de ses 51, 52 ou 55m
(?).
Au centre de l'édifice, sur chacun des côtés, quatre
niches immenses accueillent des statues dorées du Bouddha debout de 9,50m
de haut. Ces statues sont en teck recouvert de stuc, c'est pourquoi deux (est
et ouest) ont été remplacées à la suite d'un incendie.
La galerie qui parcourt les quatre côtés de l'édifice est
ornée de niches contenant de sculptures en grès qui ne sont pas
sans rappeler l'Inde.
Nous commençons par le sud avec le Bouddha Kassapa en position du sermon qui apparaît souriant et amical vu de loin. A l'opposé, au nord, se dresse le Bouddha Kakusanda également en position du sermon. L'est nous montre le Boudhha Konagamana, bras pendants. A l'ouest, on arrive au Bouddha Gautama, les mains ouvertes tournées vers l'extérieur dans un geste de protection; deux statues de ses nouveaux adeptes sont agenouillées à ses pieds.
En
carriole jusqu'au coucher de soleil
| ||
Il
est déjà 16 heures et aussitôt après cette visite nous
avons rendez-vous avec nos cochers pour une promenade en "calèche
rustique" (sans suspension) d'une heure, au trot sur les petits chemins serpentant
parmi les beaux temples du site, notamment à l'est et au sud Vieux
Bagan: pagodes tardives Htilominlo (XIIe s.) -que
nous devions visiter mais que la visite du village W-Pasaw a remplacé-
, Sulamani (fin XIIe s.) et Mingalazedi (fin XIIIe s.), l'impressionnante
Dhammayangyi (temple fortifié du XIIe s.)... pour se terminer une
heure plus tard au pied de la pagode Shwesandaw pour assister au coucher de soleil
sur la plaine.
C'est aussi l'occasion de voir de près les cultures et parfois les paysans au travail. Champs de haricots nains à longue gousse, courges, arachide, sorgho (? pour le cocher il s'agit de maïs). Quant au riz, il a été récolté et les prochaines semailles attendront les pluies car dans cette région à sol sableux et au climat assez sec, on n'en fait que deux récoltes par an. De même le sésame a déjà dû être récolté. En cours de trajet nous rencontrons aussi les chars et les zébus enrubannés que nous avions vus lors du défilé du matin...
Mais
arrivons-en à la pagode Shwesandaw. Elle date du XIe s. et possède
une base pentagonale.
Des escaliers très raides (marches hautes et
étroites) sont encore autorisés (on peut se demander pour combien
de temps) pour donner accès à la cinquième terrasse d'où
l'on peut admirer le coucher du soleil. En attendant, on peut prendre quelque
points de repères: d'abord en ombre chinoise, donc à l'ouest, la Pagode
Mingalazedi (XIIIe s.), "la Bénédiction" ou "le porte-bonheur", immanquable
au nord-ouest une très grande (61 ou 63 m) pagode blanche du Vieux Bagan,
Thatbyinnyu (XIIe s.). Vers la droite, donc au nord, on voit un peu plus
éloignée, la pagode Ananda que nous avons visitée en début
d'après-midi. Vers le nord-est, dans le lointain, la tour d'observation
et, un peu plus proche, la pagode pyramidale en brique Sulamani (XIIe s.).
Enfin, au sud-sud-est, la pyramide grossière de la pagode Dhammayangyi (XIIe s.)...
17 heures, il faut encore attendre une bonne demi-heure pour assister au
coucher du soleil mais les bonnes places sont déjà prises
d'assaut. Le spectacle crépusculaire qui embrasse une grande part des sites
de Bagan dure une quinzaine de minutes. Pour la redescente, il faut être
patient pour éviter la bousculade.
| |||
Vers 1h30, nous nos rendons au restaurant Nanda (ou Nandar) à Nyaung U pour un dîner-spectacle de marionnettes birmanes. Ici pas de plateau tournant à la chinoise mais un plateau individuel laqué (daung lan) à 9 cases, dont une pour le riz et une autre pour faire nos petits mélanges sur un morceau de feuille de bananier...
Le
grand espace de restauration couvert accueille plusieurs scènes et le spectacle
nous arrive vers 19 heures. Bien que nous soyons en bonne place, je suis mal équipé
pour prendre des photos d'objets très mobiles dans un espace peu éclairé.
Les 28 marionnettes, y compris un cheval, sont animées par trois ou quatre
manipulateurs dont les bras se croisent et se décroisent derrière
les décors, sans s'emmêler les fils.
Nous avons fini le repas
avec une banane copieusement flambée.
Après cette journée bien remplie, c'est avec plaisir que nous retrouvons nos lits au Thazin Garden, des lits que le personnel de ménage a décorés avec de vrais faux pétales de "fleurs" de bougainvillier. L'attention est bonne mais la qualité du ménage en pâtit un peu...