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De l'aéroport Napoléon Bonaparte (anciennement Campo dell'Oro) d'Ajaccio,
nous devons effectuer un trajet d'une trentaine de kilomètres vers le Nord
pour rejoindre le petit village côtier de Tiuccia (le suffixe uccia
en langue corse indique quelque chose de petit) situé sur le Golfe de la
Liscia, exposition plein sud. Les deux caps qui délimitent le golfe étaient
protégés par des tours génoises maintenant en ruines.
Nous
faisons déjà connaissance avec la montagne car il faut franchir
le col de San Sebastiano haut de 411 m. !
La fin de l'après-midi, à partir de 16 heures, est passée à la plage (sable grossier), plage aux abords de laquelle la nature nous offre de magnifiques sculptures sur rochers, les célèbres taffoni corses. La desquamation de la roche qui conduit à former des cavités est l'oeuvre combinée de l'humidité, du sel et du vent.
C'est une forme d'érosion qui se manifeste dans les roches cristallines à gros grains, ce qui est le cas des granits corses (indépendamment de leur couleur comme on le verra en maints autres endroits de l'île). Les grains d'ici sont rosâtres et verdâtres.
Le terrain qui domine la plage a tendance à s'ébouler et il est envahi par les figuiers de barbarie (qui commencent à fleurir) et autres cactées, aloès et agaves, coquelicots, géraniums, "langues de belle mère" (ficoïdes)...
En raison de la taille réduite des hôtels, une partie
du groupe est logée à l'Allegria et l'autre aux Flots Bleus où
nous nous retrouvons tous pour dîner...
Au petit-déjeuner du lendemain,
les pensionnaires de l'Allegria ont la surprise de voir qu'on y vend un tee-shirt
en soutien à Yvan Colonna (né le 7 avril 1960 à Ajaccio,
ce militant indépendantiste corse poursuivi pour l'assassinat du préfet
Claude Érignac le 6 février 1998 à Ajaccio a été
condamné à la perpétuité le 27 mars 2009, il est vrai
sans
qu'aucune preuve matérielle n'ait jamais été rapportée).
De retour à Ajaccio ce dimanche matin, nous trouvons une"capitale"
régionale à l'allure de ville morte alors que nous sommes dans "la
capitale", siège de l'Assemblée Territoriale de Corse et chef-lieu
de Corse-du-sud!.
Nous
allons commencé par un hommage au grand personnage de la ville, de l'île
et en même temps ) l'un des grands personnages de l'histoire de France,
héros pour les uns, tyran et despote pour les autres, Napoléon
Bonaparte dont l'histoire retiendra surtout le prénom.
Il est né
ici à Ajaccio dans une famille de petite noblesse désargentée
le 15 août 1769, général, consul puis empereur, et il est
mort déchu le 5 mai 1821 sur l'île Sainte-Hélène.
Nous nous rendons dans l'est de la ville, Place d'Austerlitz
dominée par un bronze géant (3,5 m) de l'empereur Napoléon
en "petit caporal" (il mesurait environ 1,69, c'est peu pour aujourd'hui
mais c'était un peu plus que la moyenne à son époque).
Il
s'agit d'une réplique de la statue réalisée
par Gabriel Seurre l'aîné en 1833
(l'original après avoir surmonté la colonne de la Place Vendôme,
a été installé depuis 1863 dans la galerie
supérieure sud de la Cour d'Honneur des Invalides à Paris). Cette
réplique a été érigée en 1938 sur un socle
énorme qui porte gravéela liste des victoires et grandes oeuvres
impériales.
Nous sortons de la ville en direction de la pointe de la Parata
à une douzaine de kilomètres à l'ouest de la ville. Au pied
des quartiers résidentiels nous longeons une sorte de nécropole
avec des mausolées plus ou moins imposants (notamment la Chapelle des Grecs
de style baroque), plus ou moins à l'abandon, puis c'est le cimetière
marin proprement dit (70 000 tombes).
Lotissement de la colline du
Prado, hameau du Scudo (non loin de la plage de la Marinella) où se trouve
la propriété mal entretenue du fils de Constantino Rossi, plus connu
sous le nom de Tino Rossi (1907-1983), célèbre chanteur de bluettes
(300 millions d'albums vendus) que l'occupation nazie d'une partie de l'Europe
n'empêcha pas de poursuivre sa carrière (tout comme d'ailleurs les
Edith Piaf, Charles Trenet, Maurice Chevalier, Yves Montand... qui ont collaboré
à des degrés divers).
Ce qui s'impose au regard en arrivant à la Pointe de la
Parata, c'est l'imposante tour génoise cylindrique élevée
en 1608 qui le domine (à partir de 1530 les Génois en édifièrent
quelque 90 autour de l'île).
Du
pied de la tour ou de la pointe elle-même, la vue est superbe sur les
Iles Sanguinaires (en fait quatre ilots). Un nom à faire dressé
les cheveux sur la tête! Quels sombres crimes s'y seraient donc déroulés
? Rien de tel!
Plusieurs interprétations existent: approximation phonétique
à partir de îles Sagonari (la pointe sépare les golfes
d'Ajaccio et de Sagone), évocation du sang par la couleur prise par le
granit porphyroïde au soleil couchant ou par celle de la végétation
en automne, ou encore évocation d'un lieu de quarantaine pour les pêcheurs
de corail revenant d'Afrique (contaminés par le sang noir ou sanguinari)
ou pour des lépreux ou encore plus probable pour des pestiférés
(dont le sang est noir)...
Sur
la Grande Sanguinaire, on voit au premier plan un petit phare (18 m.) édifié
en 1844 et toujours en service. Au centre se dresse le lazaret ou "maison
de santé" (de quarantaine) bâti en 1808 et utilisé jusqu'en
1837. Enfin, à l'autre extrémité de l'île, les Génois
avaient construit vers 1550 une tour d'alerte.
De la pointe, on a une vue à
la fois sur le golfe de Sagone, au nord, et sur celui d'Ajaccio (profond de 1500 m.!).
Retour pour la visite de la ville d'Ajaccio en passant devant le Lycée
Fesch et le Casino municipal.
Nous commençons
par la Cathédrale N-Dame de la Miséricorde, à la façade
simple alors qu'elle devait être une sorte de réplique de St Pierre
de Rome (rien que ça!), de style baroque italien, bâtie à
la fin du XVIe s. Napoléon y fut baptisé en 1771, à
l'âge de deux ans.
Nous n'aurons pas le loisir de jeter un coup d'oeil
à l'intérieur car la grande messe dominicale s'y déroule.
Dommage.
Passant notre chemin, nous nous rendons Place du Général
de Gaulle (plus connue des Ajacciens sous le nom de pl. du Diamant). On y
voit un bronze de Napoléon en empereur romain, entouré de ses
quatre frères (Joseph, Lucien, Louis et Jérôme), bronze
dessiné par Violet-le-Duc.
Lors du réaménagement de la
place (parking souterrain), le monument qui regardait la mer, et tournait donc
le doc à la place a été retourné.
Suspendue
au-dessus du carrefour du Cours Napoléon et le l'avenue du Premier Consul,
nous voyons la couronne impériale (elle est illuminée le soir) avant
de rentrer dans la vieille ville. Arrêt (malheureusement sans visite) à
la haute (trois étages) et grande (elle occupe tout un ilot) maison
natale de Napoléon transformée pour partie en musée au
42 rue Fesch.
Dans le centre dont les remparts ont disparus, voitures de pieux
Corses dotées de leur amulette, la crucetta, une petite croix bénite
formée de deux feuilles de palmier. Dans une niche trône la statue
de la protectrice de la ville depuis 1656, la petite Madone, la Madonuccia,
N-Dame de la Miséricorde, sainte patronne d'Ajoiaccio fêtée
le 18 mars...
Puis nous arrivons Place de Maréchal Foch
(plus
connue des Ajacciens sous le nom de pl. des Palmiers) qui sépare quartiers
corse et italien. En haut de cette place se dresse au-dessus de la Fontaine aux
Quatre Lions (le lion était le symbole de la ville lors de l'arrivée
des Génois) la statue en marbre blanc de Bonaparte Premier Consul (oeuvre
de Maximilien Laboureur). La gent ailée semble y avoir fait son nid. Vers
le bas de la place, on passe devant l'hôtel de ville (le premier magistrat
est un prince Bonaparte, descendant de Jérome, frère de Napoléon)
avant d'arriver au port.
Temps libre qui nous permet de remonter la rue du
Roi Jérome jusqu'au niveau du Musée Fesch puis retour vers la Chambre
de Commerce par le quai de la République, en passant devant les étals
de marchands forains de "produits corses". Pourquoi ces guillemets?
De nombreux articles critiques portent sur ce sujet: il reste bien peu d'ânes
pour en faire des saucissons, quant aux porcs, il y en a certes mais il leur faut
appeler en renfort moultes carcasses du continent. A cela s'ajoute une polémique
(entendue sur France 3 Corse hier) concernant la saucisse noire à base
de foie, ficatellu, qui serait un véritable milieu de culture pour
bactéries! Malgré tout nous goûtons aux échantillons
que l'on nous propose.
Coup
d'oeil sur un présentoir de journaux: à la une, Corse-Matin titre
sur un assassinat... Aucun doute, nous sommes bien en Corse! L'un des pays méditerranéens
pratiquant la vendetta, une forme de vengeance familiale lavée
dans le sang. En Corse, on a dénombré 16 homicides au premier trimestre
2009*. Les attentats, autre
spécialité corse ne sont guère plus nombreux: 89 pour toute
l'année 2008 (38 revediqués par les indépendantistes) mais
on en comptait 550 en 1986 !
*
En Corse, pour l'ensemble de l'année 2009, il y aura eu 17 assassinats
pour 300 000 habitants soit un taux de 6 °/°° habitants
alors que la Sicile en aura eu "seulement" 19 pour 5 millions d'habitants
soit 0,4 °/°°, c'est-à-dire 15 fois moins en proportion!
Bastelica,
Gorges du Prunelli.
Départ pour un petit circuit qui nous offrir un premier
aperçu du maquis.
Direction
Bastelica à partir du village de Cauro.
Route de montagne (vers 600-700 m.
d'altitude) étroite et sinueuse dans le paysage forestier de la forêt
de Zipoli avec des vues sur de hauts sommets corses (2396 m). Le franchissement
des ponts est particulièrement acrobatique (souvent le parapet n'est distant
que d'une dizaine de centimètres du bord du bus).
Premières
vaches en semi-liberté (l'île compterait un troupeau de 10 000
têtes selon les autorités mais plus vraisemblablement de 50 000
têtes), végétation de pins maritimes et pins parasols...
Le
développement du troupeau de bovins à demi sauvages est dû
aux aides de l'Union Européennes mises en place au début des années
1990 afin d'encourager l'élevage de vaches allaitantes et de réduire
d'autant les excédents laitiers. Mais compte etenu de la fraude qui se
développait (un même animal était présenté comme
appartenant à plusieurs personnes qui d'ailleurs parfois n'exploitait pas
le moindre cm², l'UE a réduit de moitié ses aides à
la Corse. L'abandon d'animaux s'est développé, accru par l'exode
rural.
Nous
arrivons à Bastelica
vers 13 heures dans ce village
de 400 âmes. Une fête des agrumes s'y déroule la première
semaine de mars.
C'est la patrie du héros populaire Sampiero Corso
qui se distingua au XVIe s. dans la lutte des Corses contre les Génois.
La faim se fait sentir mais nous
sommes attendus par Jean-Pierre au restaurant "Chez Paul" situé
au-dessus du village (850 m. d'altitude).
Nous nous régalons de
charcuteries, saucissons et coppa (fait à partir de faux-filet de porc),
de ragoût de veau et d'un gâteau de semoule de maïs. Jean-Pierre
est plus comédien haut en couleur qu'un cuisinier. Histoires et anecdotes
émaillent le repas. On retiendra la célèbre chambre 14, le
passage en ce lieu de Cécilia et de Sarkozy et...de Marie-Georges Buffet.
La gastronomie ne connaît pas les frontières politiques!
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Après ce repas, le circuit se corse (facile!) car
nous revenons par la route des Gorges du Prunelli, encore plus étroite,
plus sinueuse et paysage plus minéral.
Jolies
perspectives sur le lac de Tolla (artificiel) et son écrin de granit
rose, en passant par les villages de Tolla et d'Ocana (on trouve dans ce dernier
village le seul miel bénéficiaire d'une AOC avec celui des Vosges).
C'est déjà la pleine saison des foins.
Une magnifique flore
printanière s'offre à nous au Col de Mercujo (735 m): calycotome
(sorte de genêt épineux), asphodèles blanches, sortes d'amaryllis
également blanches, cistes blancs (dit de Montpellier) qui servaient jadis
à chauffer le four des boulangers et cistes roses (indigènes), bruyères
arborescentes, lavande corse, acacias en fleur...
Premiers cochons semi-sauvages...
Plus haut, on a parlé du développement
de troupeaux de bovins à demi sauvages. Il en est de même en ce qui
concerne les porcs. En 2008, l'aéroport de Figari (nous y passerons dans
le sud de l'île en fin de circuit) fut fermé un moment car les pistes
étaient envahies par une harde de sangliers.
C'est le revers de la réputation
de la charcuterie Corse. Des "élevages" se sont improvisés
dans les villages, avec des animaux en semi-liberté à leur périphérie.
Peu à peu, des milliers de bêtes sont retournées à
l'état sauvage en se multipliant et en se croisant avec les sangliers.
En
effet, ils se croisent très bien pour donner un animal lui même fécond
et souvent appelé cochonglier (ou cosanglier, cochonglier, sangliochon,
sangliocochon). Il cumule les propriétés des deux espèces:grande
fécondité et aptitude à la vie sauvage. De ce fait le cochonglier
est devenu un prédateur redoutable. Sa viande est excellente mais non autorisée
à la commercialisation.
Ces bovins ne sont pas considérés
comme animaux sauvages et donc la chasse en est interdite et risquée dans
ce pays où des "propriétaires" irascibles pourraient se
maifester...
On
voit des exploitations maraîchères en pleine terre et sous serre
(melons, fraises), des vergers d'agrumes (citrons, oranges et les fameuses clémentines)
ainsi que des oliveraies (on cultive trois variétés et la production
commence dès un an et demi après la mise en place).
Nous
arrivons dans la banlieue ajaccienne au niveau de Bastelicaccia (le suffixe accia
est péjoratif, l'illustre ici le fait qu'en été la malaria
sévissait au village que les habitants de Bastellica dédaignaient
jusqu'au retour de l'hiver).
Retour
à Tiuccia...
CORSE