Danang (1) et Hoi An (2).
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LA LANGUE VIETNAMIENNE.

Un parcours rapide de l’histoire du pays permet de comprendre que des différences linguistiques s’observent entre le nord et le sud du pays, non seulement dans la prononciation mais même dans le vocabulaire.
Le parler du nord, le plus sinisé (1000 ans de domination chinoise, rappelons le), s'est imposé peu à peu aux régions du centre (Annam) puis du sud (Cochinchine), au fur et à mesure que le petit empire vietnamien se constituait.

Le vietnamien appartient à la famille austrasiatique (comme le khmer parlé majoritairement au Cambodge, le mon parlé par une minorité en Thaïlande, le santa parlé dans le nord-est de l'Inde, au Bangladesh et au Népal,...).

C'est une langue à six tons (4 en Chinois, 5 en Thaï), chaque syllabe ayant alors un sens différent. Ainsi "ma" peut signifier "plant de riz", "maman", "cheval", "tombeau"… De même, il y aurait plus de 100 mots pour évoquer le fait de "manger" (comme en Chine, pays qui ont vécu des siècles de famine).

Traditionnellement le vietnamien était transcrit à l’aide des idéogrammes chinois dont la maîtrise était réservée à une minorité de lettrés jusqu’au XVIIIe s. Logique, puisque la langue a beaucoup emprunté au chinois. Entre le XIe et le XIIIe s., des lettrés vietnamiens avaient tenté de forger leur propre écriture après l'éviction de la Chine, une écriture complexe mi-idéographique mi-phonétique, le chu nôm qui n'eut pas de succès.

Au XVIIe s., le missionnaire jésuite français Alexandre de Rhodes mit au point une transcription appelée quoc ngu utilisant l’alphabet latin complété de diverses surcharges (accents superposés, point sous la lettre) appelées signes diacritiques qui permettent de rendre les différentes tonalités et donc les sens différents.
Attention, ces signes ne peuvent être reproduits dans les mots vietnamiens cités dans les pages de ce site.
De plus il y a de nombreux pièges (par exemple, le "x" se prononce [s], le "ch" se prononce [t] ainsi le "bonjour",  xin chao devient [sin tao]).

Cette écriture utilisée par l'administration coloniale fut rendue obligatoire dans l'enseignement secondaire en 1906 puis elle devint l'écriture nationale en 1919 (les concours de mandarins étant supprimés). Paradoxalement, Ho Chi Minh, grand héros révolutionnaire et nationaliste, la reprit lors de son accession au pouvoir afin de faciliter l'accès du plus grand nombre à la culture. On reconnaît là son pragmatisme (Mao a un peu procédé de même en Chine, en faisant le choix de l'écriture abrégée qui avait été créée ...au IIIe s !).


Les structures grammaticales sont très simples de la forme "sujet+verbe+complément" du genre
"moi+vouloir+manger+un+repas+Vietnam".

Les phrase interrogatives sont de même forme mais terminées par des formules du genre "oui ou non ?" ou par les mots-outils tels que "qui ?" ou "quoi ?".
Les mots sont invariables : pas de marque du genre, pas de pluriel et pas de conjugaison ni de temps pour les verbes. Les distinctions sont exprimées par l’ajout de termes accessoires placés avant ou après l’élément principal (nombre ou marqueurs du pluriel, emploi d’adverbes de temps : "hier, demain, maintenant" en complément des verbes)…

Une des grandes difficultés, outre la maîtrise des tons, touche à l’emploi des pronoms personnels.

Dans la forme neutre, on a quelques chose du genre

  • JE             = "je, me moi"

  • TU             = "monsieur, madame, mademoiselle, collègue" (avec formes masculine et féminine)

  • IL, elle      ="ce monsieur là" (lui), "cette dame là"… et une forme particulière appliquée à une chose ou à un animal

  • NOUS      = "nous", avec deux formes selon que les interlocuteurs sont ou non inclus dans le groupe ainsi désigné

  • VOUS     = "messiers", "mesdames"…

  • ILS, elles = "ces messieurs là" (eux), "ces dames là"… et une forme particulière appliquée aux choses ou aux animaux

    La forme familière, équivalent au tutoiement qui est la forme normale entre membre d’une famille ou entre amis.
    Les personnes sont alors désignées par des termes en fonction de leur position et de leur âge par rapport aux interlocuteurs : enfant, papa, maman, grand-père, oncle, neveu, grand oncle, grand frère, petite soeur

    Exemples:
    "je mange avec toi" (moi, l'aîné, je mange avec toi, le frère cadet)
    => grand frère + manger + avec + petit frère
    "je mange avec toi" (moi, la mère, je mange avec toi, l'enfant)
    => maman + manger + avec + enfant
    "je mange avec toi" (moi, le père , je mange avec toi, la mère)
    => papa + manger + avec + maman

    En dehors de la parenté, ces formes sont également utilisées dans les échanges amicaux (sauf les termes enfant, papa ou maman):
    "je mange avec toi" (moi, ton ami plus âgé, je mange avec toi, mon amie plus jeune)
    => grand frère + manger + avec + petite soeur

    Outre le conditionnement confucéen, l'emploi juste de la langue vietnamienne explique pourquoi les Vietnamiens attachent tant d'importance au fait de situer leur interlocuteur en terme d'âge et de position sociale.

    Quant au français, s'il a laissé quelques traces dans le vocabulaire (ce qui est lié aux inventions et aux techniques), aujourd'hui, en tant que langue, il est parlé seulement par 500 000 Vietnamiens soit une proportion de 0 , 6%.


  • De Saigon à Danang.

    Après un vol d'une heure (environ 500 km), nous voici de bon matin à DANANG, à 100 km au sud de Hué.
    Au cours de ce vol nous avons le loisir de lire dans "Le Courrier du Vietnam", organe de l'Agence vietnamienne d'information, du 22 février 2006 (distribué sur un vol Vietnam Airlines), un article intitulé "Purger le parti des mauvais éléments" [...] "suspectés (sic) de violations (?) [...]". Il ya fort à faire!


    Cette ville fut le centre du Royaume Cham (ou Champa) du IVe au XIVe s.
    Peuple de conquérants originaires de Malaisie et de Polynésie, les Chams s'installèrent dans le sud du Vietnam dès le IIe s. Les régions côtières offraient une ouverture. C'était le cas de Danang,
    port important vu sa position centrale. Il fut utilisé par les navigateurs indiens qui initièrent la civilisation Cham en apportant la religion et l'architecture hindouistes (tours-sanctuaires en brique) et l'écriture sanskrit.
    Puis , plus tard, aux XVIIe et XVIIIe s., le port de Danang fut utilisé par les colons espagnols puis français. Elle fut appelée Tourane par les Français. Peu à peu, ce port supplanta celui de Hoi An. Dans ce nouveau contexte, la civilisation du Champa disparu au XVIIe s. et le peuple Cham forme une ethnie minoritaire du pays.

    Les premiers Marines américains débarquèrent ici en 1965 et ce fut la base de repos des GI’s.

    Apparemment, la ville ne présente pas grand intérêt. Economiquement, elle est plus pauvre que Saigon. Les motos y sont plus rares et plus vieilles. Les vélos sont nettement plus nombreux et les camions d'un âge canonique, sans doute soviétiques ou chinois comme nous en verrons beaucoup dans le centre du pays.

    Notre bref passage à Danang va être marqué par la visite du Musée de la Sculpture Cham (édifié en 1915) qui regroupe la plus belle collection d’art cham visible en Asie.
    Comme le Musée d'Histoire de Saigon, il semble quelque peu vieillot. Nous serons accompagnés par un guide haut en couleur, Louis XX ou Louis Vinh (?), un ancien Vietnamien qui parle un français très correct, hormis l'accent!

    DANANG - Musée Cham. DANANG - Musée Cham. DANANG - Musée Cham.
    DANANG - Au Musée Cham: Ganesh, Louis XX (!) et le Linga.

    On y verra des représentations des divinités du panthéon hindouiste, la grande triade Brahma (le créateur), Vishnou (le conservateur) et Shiva (le destructeur et aussi le fertilisateur) et d'autres divinités (Ganesh, le dieu éléphant)...
    ...et à nouveau le fameux linga, symbole phallique dressé au-dessus du yoni (symbole du sexe féminin) constitué ici par une cuve à ablution ornée de multiples seins!

  • la partie inférieure carrée (absente ici) posée sur le yoni symbolise Brahma
  • la partie centrale octogonale symbolise Vishnu
  • la partie supérieure sphérique ou plus ou moins arrondie symbolise Shiva.





    Sur la Route Mandarine en direction de Hoi An, arrêt dans un atelier et magasin de vente d'ouvrages en broderie, de véritables tableaux faits parfois de millions de points (pour les plus grands et les plus compliqués), à l'aide de fils de soie de toutes les couleurs par de bien jeunes brodeuses courbées sur leur ouvrage.










    Arrivés en tout début d'après-midi à HOI AN, sous un ciel un peu brûmeux, nous pouvons observer comment l'administration vietnamienne essaie d'apprivoiser l'activité touristique sur un site considéré comme étant de premier ordre. A un moment donné nous avons vu les petits vendeurs qui nous escortaient à l'entrée de la petite ville déguerpir comme des lapins au cri lancé par l'un d'eux. La cause en était toute simple, quelques policiers passaient faire leur ronde dans le coin...

    Le site de Hoi An (ex Faifo) était occupé, selon certaines fouilles, plus de 2000 ans avant notre ère. C’était le principal débouché maritime lorsque le royaume Cham était établi à Trakhieu. Après le XVe s., des bateaux de tous les pays y firent escale : chinois, hollandais, anglais, japonais, portugais, français, indonésiens, etc... Ces bateaux venaient y acheter soie, porcelaine, thé, poivre, laque...
    On y voit ses maisons corporatives des congrégations marchandes chinoises et les demeures de grandes familles (Tran Tu Nhac, Tan Ky, Phung Hung, Tran Duong). On compte plus de 800 bâtiments d'intérêt touristique!


    La vieille ville a été classée au Patrimoine Mondial de l'UNESCO en 1999.


    Hoi An, du moins dans sa partie ancienne, est un peu une "ville-musée" ou une "ville-boutique à souvenirs" comme notre Mont St Michel.

    Edifice le plus original, son "Pont japonais", le Lai Vien Kieu, ce qui signifie "Pont des Passants du Lointain" (!), un pont couvert qui fut bâti par la communauté japonaise de la ville afin de relier les quartiers chinois et japonais. Les accès du pont sont gardés du côté chinois par 2 singes (année 1593) et du côté japonais par 2 chiens (année 1595).

    Tout près de là nous visitons une des maisons anciennes de la ville. Elle a plus de deux siècles et la même famille y vit depuis sept générations. Cette maison repose sur de robuste piliers fait d'un bois très dur dit "bois de fer", heureusement imputrescible car lors des fréquentes crues l'eau monte dans la maison sur une hauteur de 80 cm. La charpente compliquée, emprunte à l'architecture japonaise.
    Accessoirement à la visite, regard sur l'atelier de broderie de soie sur nappes (modèles originaux renouvelés tous les ans) installé dans une partie de la demeure.

    Dans la foulée, nous visitons le temple Hoi Quan Quang Dong.

  • HOI AN - Pont japonais. HOI AN - maison ancienne.
    HOI AN - Pont japonais.

    HOI AN - maison ancienne.

    HOI AN - temple Hoi Quan Quang Dong. HOI AN - temple Hoi Quan Quang Dong.
    HOI AN - temple Hoi Quan Quang Dong.


    Puis nous passons une partie de l'après-midi à nous promener dans la ville, sans but précis, en flânant dans les rues Tran Phu et Nguyen Duy He, en passant sur l'autre rive par le pont Cau Cam Nam puis en revenant sur nos pas par la rue Bach Dang, le long des quais de la Thu Bon. Au hasard, on y voit un tournage de film (avec une scène d'enterrement) et aussi plusieurs chantiers de voiries où s'affèrent des "cantonnières". A ce propos, tout au long de notre circuit, en sans parler des paysannes, nous aurons vu quantité de femmes effectuant des travaux pénibles, des "travaux d'hommes": terrassiers, manoeuvres tournant du béton à la pelle, éboueurs...

    HOI AN - tournage de film. HOI AN - la rivière Thu Bon.
    HOI AN - tournage de film.

    HOI AN - la rivière Thu Bon.

    HOI AN - travaux de voirie. HOI AN - travaux de voirie.
    HOI AN - travaux publics et terrassements effectués par les femmes.
    Rappelons ici une boutade qui dit:
    "Le capitalisme, c'est l'exploitation de l'homme par l'homme tandis que le communisme, c'est exactement le contraire.".
    et des femmes alors, que dit-on ?




    Puis nous arrivons à notre hôtel, dans une zone humide, avec une activité d'aquaculture dans les nombreux étangs voisins. Il faut dire que plus de 1000 espèces de poissons sont consommées au Vietnam, le poisson occupant une part plus importante que la viande dans l'alimentation des habitants.

    A quelques 500 m de là, une plage bordée de cocotiers! A l'heure où les lycéennes rentrent joliment vêtues de leur ao dai il est encore temps d'aller faire trempette dans cette annexe du Pacifique qu'est la Mer de Chine. Mais il faut aimer les rouleaux.


    Nous pouvons observer des jeunes en train de faire longuement leurs exercices de thaï chi chuan sur la plage. Quelle souplesse ! Moins drôle, nous sommes harcelés par quelques vieilles femmes cherchant à nous vendre des fruits...






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