CHIAPAS
canyon de Sumidero (1),
San
Cristobal (2), San Juan Chamula (3)
et
cascades de Agua Azul (4)
L'insurrection
des Indiens et le "sous-commandant" Marcos.
L'état du Chiapas compte 4 M d'habitants (45% ont moins de 15 ans) dont un
tiers d'origine maya. Près de la moitié n'ont pas accès à l'électricité, 30% sont
analphabètes et un tiers ne parlent pas espagnol. Beaucoup d'Indiens vivent dans
des huttes rudimentaires dans les forêts et n'ont jamais profité de la réforme
agraire décidée lors de la révolution mexicaine zapatiste d'il y a un siècle.
Il raconte l'anecdote suivante: un touriste gringo qu'il avait
un jour dans un groupe, apitoyé par le denuement d'un Indien luiavait proposé
de lui donner quelques uns de ses vêtements et des chaussures. En réponse l'Indien
avait dit qu'il serait ridicule ainsi accoutré dans son village et lui a demandé
s'il porterait à New-York les habits traditionnels qu'il lui proposait en échange.
Les richesses de l'exubérent Chiapas ne sont pas qu'agricoles. Il
ya la forêt, l'hydro-électricité (le relief et la pluviométrie y sont on ne peut
plus favorables) mais surtout l'or noir (la moitié des réserves pétrolières mexicaines)...
Le P.R.I. (Parti révolutionnaire institutionnel
au pouvoir depuis 1929) annonce le 28 novembre 1993 que le président Salinas a
nommé Luis Donaldo Colosio pour représenter le parti à l’élection présidentielle
d’août 1994.
Se réclamant d'une ancienne tradition de révoltes paysannes
et indiennes, des insurgés d’origine maya (tzotzil, tzeltal, tojolabale, chol
et lacandone) réclament la destitution du dictateur et l’instauration d’une réforme
agraire; ils dénoncent le génocide des Indiens et s'opposent à l'A.L.E.N.A. (Accord
de libre-échange nord-américain ) qui selon eux, menace la souveraineté nationale.
Un groupe armé de quelques centaines de guérilleros de l’E.Z.L.N. (Armée
zapatiste de libération nationale) investit 5 villes de l’État du Chiapas dont
San Cristóbal de las Casas, le 1er janvier 1994. Face à l'intervention de l'armée,
les zapatistes se retirent des villes investies pour gagner les zones montagneuses
et boisées bombardées par l’aviation. Suite à de gigantesques manifestations
à Mexico même et avec la médiation de l'évêque de San Cristóbal, l’E.Z.L.N. noue
un dialogue avec le gouvernement et négocie une amnistie pour les rebelles. Le
gouvernement mexicain reconnaissant les causes économiques et sociales du conflit,
octroie une autonomie politique, économique et culturelle des Indiens de l’État
du Chiapas et des mesures sociales en faveur de la population indienne défavorisée.
Dans l'intervalle, le candidat du P.R.I. est élu. En septembre 1994, les
négociations sont rompues et l’E.Z.L.N. bloque des routes et s’empare de plusieurs
villes de la province jusqu'à ce que l'armée reprenne le contrôle de l'essentiel
du territoire. Le président Ernesto Zedillo ordonne à l’armée d’évacuer les
principales positions zapatistes et annonce la distribution aux Indiens du Chiapas
de 26 000 hectares de terres illégalement détenues par les grands propriétaires.
Le 9 février 1995, Ernesto Zedillo ordonne l’arrestation des dirigeants
zapatistes et révèle l’identité du sous-commandant Marcos et déclare que le but
de l’E.Z.L.N. n’est rien d'autre que de consduire une guérilla pour renverser
le gouvernement et il lance donc l'armée à la reconquête des territoires occupés
par les zapatistes tout en les invitant peu après à reprendre les négociations!
Les zapatistes organisent un référendum pendant l'été 1995 dont il ressort
une approbation du mouvement insurrectionnel et sa transformation en parti politique.
D'ailleurs le sous-commandant annonce bientôt la création du Front zapatiste de
libération nationale pour un Mexique démocratique et chasser le P.R.I.
Leurs voeux seront exaucés deux ans plus tard, le P.R.I. est battu par le P.R.D.
(Parti de la révolution démocratique) et le P.A.N. (Parti d’action nationale)
et perd la majorité à la Chambre de députés. Le sous-commandant prend des
positions ambiguës en ne renaonçant pas à la lutte armée jusqu'à l'obtention de
la pleine satisfaction des revendications zapatistes. Un massacre de 45Indiens
zotzils survient fin 1997 dans des circonstances troubles mais finalement le gouvernement
en est tenu pour responsable aux yeux de l'opinion. En 1999, les partis d'oppositions
font front commun pour obtenir des élections générales qui ont lieu en 2000. Le
P.R.I. est complètement écarté, la présidence revenant à Vicente Fox, du P.A.N.
Une "longue marche" conduite par le sous-commandant Marcos arrive le
11 mars 2001 à Mexico pour la discussion d’un projet de loi sur les droits et
la culture indigènes discuté par le gouvernement et les zapatistes en février
1996. Des zapatistes masqués interviennent à la tribune du Parlement pour défendre
le projet de loi puis l’E.Z.L.N. regagne le Chiapas tandis que la réforme constitutionnelle
est rejetée par le Congrès national indigène...
La guérilla néo-zapatiste semble diversement perçue dans le Pays, elle déroute
certains par son côté intellectuel voire universitaire même si elle a comporté
quelques épisodes sanglants. L'utilisation médiatique en est une des grandes originalités
mais elle lasse parfois. Certains Mexicains font, paraît-il, une comparaison entre
le sous-commandant et notre José Bové. Pour qui est-ce le plus flatteur ?
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En milieu de journée, vol de 50 minutes pour Tuxla Guttierez, capitale de l'état
du Chiapas, soit près de 400 km, par dessus l’isthme de Tehuantepec,
ce qui permet de survoler des zones montagneuses longeant la côte du Pacifique.
Un nouveau bus nous emmène au canyon de Sumidero.
CANYON DE SUMIDERO
Visite des gorges
impressionnantes en bateau rapide pendant 1h30: grottes, falaises de 1000 m,
une profondeur d'eau de 150 à 250 m ! Sur près de 25 km, cette gorge
du rio Grijalva (selon les uns!) ou du rio Chiapas (selon les autres!) est noyée
depuis la création du barrage Manuel Moreno Torres.
Selon des légendes indiennes,
après une âpre résistance face aux Espagnols, tout le peuple se serait jeté du
haut des falaises pour échapper aux envahisseurs.
Tout en descendant
le lac en direction du barrage, on peut apprécier sur les rives la diversité
de la flore et de la faune: cactées, arbres en fleurs (jaunes, roses, violets),
cormorans, crocodiles, pélicans, vautours à tête noire, aigrettes…
Tout une faune et une flore vit ici. |
Vautours à tête noire |
''L'arbre de Noël'', une concrétion de mousses. |
Des falaises de 1000 m. |
Impressionnante
route vers San Cristobal, parcours sinueux en montagne (montant à 2700 m
depuis les gorges situées à 300 m).
Traversée de petits villages, portions
cultivées sur des pentes rocheuses (plants de maïs desséchés en cette saison)
et des sous-bois fleuris (arums, sortes de chrysanthèmes, amaryllis…).
Sur
le bord des routes, on croise ou l'ont dépasse des Indiens portant de lourdes
charges sur le dos tandis qu'une sangle venant en bandeau sur leur front permet
de soulager une partie du fardeau, à la force des muscles du cou!
SAN CRISTOBAL DE LAS CASAS, ancienne capitale de l'Etat du Chiapas
Arrivée nocturne à San Cristobal (120000 hab. 2100 m.
d'altitude) avec encore un superbe (au-delà de la façade) hôtel central, style
colonial, le D’Monica (avenida Insurgentes) avec jardin patio, galeries, xylophone…
Dégustation de tortillas variées après un délicieux posh
apéritif et au son du xylophone dans un restaurant typique.
Le lendemain,
matinée au marché municipal de plein air, au nord de la ville : bien que
ce soit l’hiver, fruits et légumes frais ou séchés (piments) à profusion (pas
de pesage mais des mesures avec des petits seaux en plastique). Des indiens dans
divers costumes colorés (jupes grossières en laine noire), souvent pieds nus.
Marché artisanal sur les places autour des églises Santo
Domingo (et de trois!) et de la Charité (textiles brodés, travail sur
bois, cuir…). Difficile de photographier.
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Marché d'artisanat indien autour des églises Santo Domingo et
de la Charité |
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A 18h,
devant la remarquable
cathédrale du XVe s. avec sa façade ocre, attente vaine de la sortie de
cérémonies : fêtes typiques des jeunes filles de 15 ans , mariages, baptêmes (il
existe une sortie latérale !).
Bartolomé de Las
Casas surnommé l'Apôtre des Indiens, fils d'un marchand, il avait accompagné Christophe
Colomb lors de son second voyage aux Amériques.il ressent l'appel de la vocation
et il devient ainsi le premier prêtre américain. Pour les services rendus, il se
voit doté d'une encomienda. La couronne espagnole transpose en Amérique
le système qu'elle avait appliqué aux musulmans vaincus sur son sol, système découlant
des pratiques de vassalité et de servitude médiéval. Elle confiait (encomendar)
à ses représentants, un certain nombre d’Indiens réduits à l'état d'esclaves.
Un colon espagnol en récompense de ses services percevait, en or, en nature,
ou en travail, le tribut dû à la Couronne par les Indiens. En contrepartie, il
devait les protéger, les convertir au christianisme, bref, les civiliser...
Bartolomé de Las Casas, prend conscience des abus du système, renonce à "ses"
Indiens et se lance dans une croisade pour l'abolition de l'esclavage en s'adressant
directement au roi d'Espagne (1515 et 1542) et devient dominicain (on comprend
pourquoi tant d'églises sont dédiées à St Dominique). Il se prend de passion
pour le monde indien et conscient de le disparition d'une civilisation, il écrit
l'histoire de la colonisation espagnole en Amérique. Ses efforts sont récompensés
en 1542 avec les "Nouvelles Lois" abolissant le système de l'encomienda et interdisant
l'asservissement des indigènes. Il devient évêque du Chiapas.
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Sur le Zocalo, la cathédrale du XVe s..
SAN JUAN CHAMULA Visite
de l'église pas très catholique du village....
Première particularité,
ici pas de représentations de saints à l'extérieur, sur la place du marché, l'église
présente une façade à décor floral.
Le vrai choc survient lorsque
l'on y pénètre : dans une atmosphère enfumée, on aperçoit le sol recouvert de
ce qu’on prend pour de l’herbe, en fait il s'agit de longues aiguilles de pin
(désodorisant naturel), des familles indiennes à genoux ou assises à même le
sol devant des dizaines de bougies allumées ! Ils prient, mangent, boivent (du
Coca ! que les Indiens parent de diverses vertus), parlent ou chantent, les enfants
s’amusent.
Souvent ils ont apporté une volaille qu’ils sacrifient sur
place et remportent ensuite.
Sur la place, l'église. |
Dans une autre église d'un village indien de la région de San Cristobal (d'après
carte postale). |
Un chaman est là
qui peut apporter son aide mais on ne l’a pas vu intervenir (il prend la main,
écoute, conseille et fait des impositions notamment avec des oeufs !!!).
Les touristes peuvent circuler librement, y prier à leur façon mais sont interdits
de photos (sur le parvis on peut acheter des cartes postales d'églises d'autres
villages aux pratiques similaires).
Dans cette église sans bancs ni autel,
les bas côtés sont occupé par de nombreuses statues de saints bien catholiques
! Une fois par mois, ce "temple" redevient véritablement église lorsqu’un
prêtre vient y célébrer la messe.
Etonnant syncrétisme !
En
quittant le village, Jésus évoque d'anciennes expériences
psychédéliques qu'il a vécues dans les tribus indiennes au
nord de Mexico à la suite de la consommation de champignons hallucinogènes
(perte de la conscience de son environnement réel dans une pièce
obscure où peu à peu ses accompagnateurs étaient remplacés
par des animaux peu sympathques...).
AGUA AZUL
En route vers l'est et le
Yucatan, nous traversons encore des montagnes luxuriantes (il y pleut 4500 mm)
aux grands arbres couverts d’épiphytes et de lianes, de bananiers, de caféiers.
Des villages indiens aux bouquets d’amaryllis rouges ou blancs, avec des dindons
(les fameux "poulets d'Inde" des conquérants!) et des porcs en liberté. Compte
tenu du climat tropical humide qui règne ici, on y voit du maïs à tous les
stades, planté sur des pentes escarpées, parfois à raison de quelques plantes
entre des blocs de rochers. Mais la dégradation de l’écosystème est importante
en raison de la déforestation (5000 km² par an) et des techniques de brûlis.
De 2000 m, descente rapide à 300 m pour les cascades d’Agua
Azul, après paiement d’une redevance révolutionnaire au mouvement du sous-commandant
Marcos (certains membres du groupe sont un peu inquiets et récriminent dans leur
coin au sujet de ce "racket").
Arrivée aux magnifiques cascades qui
méritent leur nom en cette saison sèche (moins jolies en saison des pluies,
elles doivent alors être monstrueuses) sous un couvert forestier extraordinaire,
habité de perroquets… Baignade dans ces piscines à la couleur naturellement turquoise...
MEXIQUE