Carmona (1),
CORDOUE (2).
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UN PEUPLE "ROM", LES GITANS

Les Gitans, Gitanos ou Kalés , parfois appelés Tziganes (ou Tsiganes), Gypsies, Manouches ou Romanichels... ailleurs en Europe, appartiennent à un peuple qui a quitté le nord du sous-continent indien sous la pression des invasions musulmanes et mongoles, entre le VIIIe et le XIe siècle. Il est souvent désigné sous le nom générique ROM, terme qui n'est pas toujours admis par les divers groupes...

On a d'abord pensé qu'ils étaient originaires du Sind et du Penjab (aujourd'hui Etats du Pakistan) avant de déterminer qu'ils venaient du Rajasthan où ils exerçaient des métiers tels que chiffonniers, ferronniers ou saltimbanques, métiers nécessaires à la communauté mais considérés comme religieusement impurs. "Intouchables", ils n'avaient pas le droit d'être sédentaires et étaient hors-caste. Sans doute rejetés par la société brahmanique, c'est en tant que charrons, éleveurs de chevaux, domestiques et éclaireurs,
qu'ils se mirent au service d'autres peuples asiatiques qui migraient vers l'Ouest: Mongols (avec l'épopée de Tamerlan), Turcs Seldjoukides (autrement dit les futurs Ottomans) ou les Tatars (en Russie).

Ces populations semi-nomades sont souvent désignées sous les nom de Rom. Ce terme à l'origine s'appliquait aux Tziganes d'Europe Centrale. Ce mot trouve son origine dans le sanskrit et signifie "homme, humain, personne".
Le nom de Gitan proviendrait-il d'une altération du mot Egyptien?
Leur migration les a conduit à travers l'Europe centrale et l'Europe balkanique, régions où ils sont encore nombreux (en Roumanie, Bulgarie, Hongrie, Ukraine...).
Les estimations de population de ces peuples semi-sédentaires sont très variables: 8 ou 9 millions de personnes pour les uns et jusqu'à 15 pour d'autres (!). Ils séjournent principalement en Roumanie (2,5 millions), Espagne et Bulgarie (800 000 dans chacun de ces pays, contre 400 000 en France).

Devenus chrétiens après être passés par la Grèce byzantine où ils ont séjourné, la plupart des Rom, une fois parvenus en Europe, se mirent sous la protection des seigneurs nobles et des monastères ou abbayes, échappant ainsi à la vindicte des cultivateurs sédentaires, et continuant à exercer leurs métiers traditionnels au service de leurs nouveaux maîtres.
Leur rejet par les sociétés occidentales se manifesta dès la fin du XVe siècle..

Au terme de leur migration, une partie d'entre eux sont arrivés dans le sud de l'Espagne au XVe siècle et se fixent en périphérie des villes, au moment même où la Reconquista s'achève et où les souverains Ferdinand et Isabelle lancent l'Inquisition: conversion forcée ou expulsion des Juifs, Morisques (musulmans) et Protestants. Les Gitans, chrétiens ne l'oublions pas, sont soupçonnés de pratique maléfiques (magie noire).
Afin de les contrôler, en 1499, ils sont sommés de se sédentariser et d'adopter les moeurs et coutumes espagnoles. Rebellés, ils se réfugient dans la Sierra Nevada et combattent aux côtés des derniers morisques avant de devoir se soumettre aux rigueurs de l'Inquisition jusqu'au XVIIe siècle. Un peu plus d'un siècle après, "l'obligation de s'établir" leur est réitérée.

Sédentarisés mais préservant leur culture, le métissage avec les "non-Gitans, les payos, n'est que très partiel et ils forment un sous-prolétariat qui attire toujours la suspicion.
En recherche d'une revanche sociale, les jeunes Gitans rêvent de réussite dans la corrida, la musique, le chant et le flamenco...

L'exemple même, c'est le jeune et célèbre danseur de flamenco Joaquín Cortès, gitan d'origine cordouane, qui se fait l'avocat des droits des Roms en Europe (éducation, logement).

A une trentaine de kilomètres à l'est de Séville, en direction de Cordoue, nous faisons halte à CARMONA. C'est une jolie petite ville de 20 000 habitants, juchée au sommet d'une colline.


Malgré ses clochers, cette ville médiévale fait plutôt penser à l'Orient ou à l'Afrique du nord. Son passé est ancien: ancienne colonie carthaginoise (on y vénérait le dieu Amon) dotée de fortes défenses puis romaine (nécropole de plus de 900 tombes).
A la porte initiale (actuelle Porte de Séville) remaniée, les Romains ajoutèrent trois autres portes e un amphithéâtre (à l'ouest de la ville, non loin de la nécropole).

Elle fut conquise par les Musulmans qui réutilisèrent les anciennes fortifications et adossèrent un Alcázar à la Porte de Séville. A l'opposé de la ville, subsiste l'une des trois autres portes, la Porte de Cordoue.

Qarmuna fut par la suite la capitale d'un petit taifa (royaume) après le déclin du califat de Cordoue.

Après la reconquête, Pierre Ier, dit le Cruel, ajouta le "Palais d'en-haut" (Alcázar de Arriba) aujourd'hui tranformé en Parador (hôtel de luxe appartenant à la chaîne gérée par l'Etat espagnol) .
Le Prieuré Santa Maria, situé au centre de la cité prit la place de la mosquée Al Jama qui avait été construite au IXe s. et dont ne subsiste que la Cour des Orangers (cour des ablutions à l'époque de la mosquée) et une partie du minaret.

Couvents et petits palais ont été édifiés à l'époque moderne.

 
CARMONA - ville basse (église San Pedro) et Porte de Séville et ancien Alcázar


La ville basse se distingue par l'église San Pedro (XV-XVIIIe s.) dont le clocher rappelle la Giralda de Séville.
Il faudrait avoir du temps pour aller admirer son intérieur baroque.
C'est dans ce quartier, hors les murs, que se trouvent la nécropole romaine et les vestiges de l'amphithéâtre.






Par la porte de Séville, d'origine romaine puis remaniée par les Almohades, on accède à la ville haute avec ses vestiges d'Alcázar, ses petits palais mudéjars et néo-mauresques, ses églises et couvents et ses maisons aux murs chaulés qui se serrent le long de ruelles sur lesquelles ouvrent de frais patios.

Notre parcours nous fait emprunter la rue San Felipe, la place San Fernando... jalonnées par la "Maison Dominguez", l'église San Felipe, l'église du Salavador (et l'hôtel de ville), le couvent Madre de Dios...








Nous reprenons la route en direction de Cordoue. Nous passons non loin de la ville d'Ecija lovée au fond d'un vallon, ce qui lui procure la réputation d'être un véritable four en été.
Sur le trajet, nous avons aussi l'occasion d'apercevoir des haciendas plus ou moins prospères.

Une plaine ondulante est couverte de céréales dorées, de tournesol encore bien verts et parfois de pavot (pour usage médicinal). Lorsque les terres fertiles de vallée fluviale cèdent la place à des sols plus ingrats de couleur rouge, les grandes cultures sont remplacées par des oliviers.

 
Haciendas sur la route entre Carmona et Cordoue.

CORDOUE

Ce fut un bastion de l'islam en Espagne quand on sait que la ville compta plus de 300 mosquées (500 ! selon certaines sources)...


CORDOUE


  Données sociales...

Le SMIC mensuel en Espagne est de l'ordre de 600€ bruts (soit la moitié du SMIC en France) mais concerne peu de salariés lesquels sont majoritairement régis par des conventions collectives. Le salaire moyen espagnol est de 1400€.

En Andalousie, le salaire moyen est plus faible que la moyenne nationale et s'établit à 65% du salaire moyen en Europe.
N'oublions pas que l'Andalousie autrefois riche, s'appauvrit considérablement à la suite de la reconquête (exil et expulsion des élites maures et juives).

La durée hebdomadaire du travail est de 40 h. La journée repose en général sur le principe de la jopurnée continue, de 8 h à 15 ou 16 h, avec un petit-déjeuner à 11h30.
Pour les scolaires, la plage de travail est de 8h30 à 14h30.
La sieste (de sexte, mot d'origine latine) est d'importation romaine (mais se pratique plus tôt que l'étymologie ne l'indique).

3 millions de travailleurs dépendent de système de sécurité sociale autonomes tandis que 6 millions des 8 millions de retraités ne perçoivent qu'un minimum vieillesse.
Un grave problème concernait les veuves qui n'avaient pas eu d'activité professionnelle jusqu'à la mise en place des retraites de réversion en 1995.

Il n'y a pas d'allocations familiales ni de logements locatifs sociaux alors que les loyers privés sont très élévés. En revanche, l'accession à la propriété est développée (durée de prêtes jusqu'à 50 ans!).

L"Espagne a des besoins de main d'oeuvre ce qui explique sa relative ouverture (ou non fermeture?) aux flux migratoires.

Au niveau des finances publiques, du fait d'une organisation de type fédéral, la moitié des ressources de l'Etat espagnol est redistribué aux instances locales. Cette décentralisation qui fait contrepoids à l'Etat central présente l'avantage de la réactivité mais entraîne des redondances et ouvre la porte à l'établissement de baronnies, au clientélisme, voire à la corruption...

...et les femmes ?

La nouvelle constitution de 1978 qui sépare l'Eglise et l'Etat donne aussi un nouveau statut aux femmes. Finie l'obéissance au mari (la femme traditionnelle se tenait debout derrière le macho qui déjeunait), droit au divorce (1981), à la contaception et même à l'avortement (1985)... malgré la vive hostilité de l'Eglise espagnole.

Cordoue, ville de 300 000 âmes, fut autrefois reliée à Rome par une voie par laquelle des céréales étaient acheminées vers la capitale du grand empire.

Même si la ville d'aujourdhui est de dimension modeste, ce fut pourtant la capitale de l'Andalousie omeyyade. Pendant 250 ans, elle fut d'abord la capitale d'un émirat puis encore, pendant trois siècles, la capitale d'un califat qui pendant un temps rivalisa avec ceux de Damas et de Bagdad. Mais son époque de réelle puissance ne durera qu'un siècle avant que se produise un émiettement en royaumes rivaux, les taifas.
Ce fut aussi la patrie de grands philosophes et savants, le latin Sénèque, l'arabe Averroès et le juif Maimonide. La ville se dota d'une Université dès le Xe siècle. Le rayonnement de la ville fut donc également intellectuel, scientifique et artistique.

La ville fut reconquise dès 1236 par Ferdinand III (cousin de St Louis).

Le centre historique est classé au Patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1984 .

Nous abordons la ville en longeant la rive droite du Guadalquivir, au pied des murs de l'Alc
ázar construit au XIVe s. par Alphonse XI dans le style mudéjar, c'est-à-dire un style néo-mauresque rappelant la magnificence des palais des anciens souverains musulmans. Ces vestiges de l'Alcazar comportent une magnifique salle des mosaïques et de nombreux patios, jardins et pièces d'eau se trouvent tout près de la mosquée-cathédrale.


Notre visite pédestre commence en face du pont romain actuellement en travaux de restauration. Ce pont à seize arches, datant de l'époque d'Auguste et rebâti par les Maures, relie le centre de la ville au Campo de la Verdad, quartier situé sur l'autre rive du Guadalquivir.

Des moulins arabes, on peut avoir une idée avec la Noria de la Albolafia qui était destinée à alimenter en eau le tout proche Alc
ázar.
Nous pénétrons dans la cité par Porte du Pont puis la Place du Triomphe et là se dresse sous nos yeux les murs austères de la Mezquita et la façade décrépie du Palais Episcopal (travaux programmés).

Petite découverte libre du centre et du quartier de la Juderia avant de déjeuner .

Le début d'après-midi est consacré à la visite avec une guide locale de l'extraordinaire mosquée-cathédrale aux 850 colonnes de granit et de jaspe. On parlait autrefois de la mosquée aux "1000 colonnes" mais c'est sans doute un peu exagéré si l'on fait le produit du nombre maxium de colonnes par rangées et du nombre de rangées mais c'est une façon efficace de frapper les esprits (comme en Inde du sud, on parle du temple Sri Ekambaranathar de Kanchipuram en le qualifiant de temple aux "1000 piliers").

La Grande Mosquée ou Mezquita est l'une des mosquées qu'avait comptées la ville dans sa période musulmane où elle rivalisait avec La Mecque.

Diverses influences de l'art musulman se mêlent ici.
- Art des Syriens omeyyades avec les arcs outrepassés, minarets carrés et mosaïques (influence byzantine). Certains auteurs attribuent l'arc outrepassé aux prédecesseurs des Arabes, les Wisigloths tandis que l'arc brisé et l'arc en accolade seraient d'origine syrienne.

- Art des Perses abassides avec les arcs polylobés et les inscriptions coufiques (calligraphie à la base très linéaire, très décorative utilisée pour écrire des versets du Coran au XIe siècle)...

Nous avons là le schéma traditionnel d'une mosquée dans son enceinte rectangulaire (175x135 m.) crénelée à laquelle on accède en pénétrant dans une cour bordée de galeries (la cour des Orangers) avec le grand bassin d'Al Mansour, où les fidèles procédaient aux ablutions rituelles. Plus avant se trouve la fameuse salle de prière avec sa forêt de colonnes et, tout au fond, un splendide mirhab à coupole de marbre.


CORDOUE - partie ancienne (VIIIe s.) de la Mezquita



AL-ANDALUS

Les Omeyyades, dynastie sunnite originaire de Damas qu'elle dut fuir (révolte menée par les chiites Abbassides) en passant par le Maghreb avant d'aboutir en Espagne où ils fondèrent un émirat à Cordoue en 756, émirat qui se rattachait au califat chiite de Bagdad.
En 929, Abd al-Rahman III se proclame calife (à la même époque existent donc deux autres califats, celui de Bagdad déjà cité et le califat chiite de Tunis!).
Ce sera l'époque de la gloire de Cordoue dont chaque souverain s'attachera à magnifier la grande mosquée que leurs ancêtres Abd al-Rahman Ier et Abd al-Rahman II avaient ébauchée aux VIII et IXe s. La grandeur de cette dynastie reposera sur Al-Mansour, premier ministre et chef des armées d'Hisham II qui repoussera les chrétiens jusqu'au nord de la péninsule. Son fils poursuivra l'oeuvre militaire de son père mais son assassinat marquera le déclin rapide des Omeyyades: les gouverneurs de provinces déclarent leur indépendance et le califat est aboli en 1031.

Ces petits états, Los Reinos de Taifas, sont vulnérables face aux efforts chrétiens de reconquête. Losque Tolède tombe en 1085, les petits royaumes maures demandent l'aide des Berbères Almoravides d'Afrique du nord en 1086 qui parvinrent à stopper l'avancée d'Alphonse VI et à réunifier l'Espagne musulmane pour un temps. Leur fanatisme religieux suscita des révoltes qui affaiblirent leur pouvoir et ramenèrent des divisions.

A nouveau, un siècle plus tard, le pouvoir musulman dû faire appel à l'aide extérieure, celle des Berbères Almohades.
Mais ils ne parviendront pas à contrer la Reconquête qui s'accélère à partir de 1212: Cordoue tombe en 1236, Jaen en 1246, Séville en 1248, Cadix en 1262, Jerez en 1264.
La guerre de Cents Ans qui oppose les grandes puissances européennes donne un coup d'arrêt à la reconquête.

Les réfugiés et notamment les Musulmans se replient dans le dernier royaume musulman, celui des Nasrides de Grenade qui vit alors une véritable renaissance économique et culturelle. Le royaume survivra deux siècles sous l'égide des Nasrides (dynastie issue de Muhammad ibn Yusuf ibn Nasr) qui durent reconnaître la suzeraineté de la Castille et payer un tribut. Les dissensions internes au royaume sont mises à profit par les Catholiques qui relancent la conquête à partir de 1407. Málaga tombe en 1487 puis Almería en 1489 et c'est pour finir la prise de Grenade par Isabelle de Castille en 1492.

LA MEZQUITA

- La construction de la mosquée fut entreprise au VIIIe siècle, en 785, sur l'ordre du premier émir omeyade Abd Al-Rahman Ier, à l'emplacement de la basilique wisigothe St Vincent (VIe s.) qui, elle-même, aurait remplacé un temple romain... Il s'inspira de la mosquée de Damas.
Les matériaux de la basilique furent récupérés pour sa construction ainsi que des colonnes rapportées de Turquie ou prélevées parfois sur des temples romains d'Afrique du nord.
Elle comportait à l'origine dix rangées de colonnes démarquant onze nefs perpendiculaire au mur sud-est (la qibla orientée vers La Mecque). Les arcs à deux niveaux superposés (inspiration syrienne ou d'après les aqueducs romains) sont constitués d'une alternance de briques et de pierres blanche.

- Plus tard, au IXe siècle, un autre souverain, Abd Al-Rahman II recula le mur de la qibla afin de prolonger les nefs et il construisit le sanctuaire ou mihrâb surmonté d'un dôme orné de mosaïque. Son successeur, le Calife Abd Al-rahman III fit ériger le minaret qui se trouve enfermé dans la tour-clocher de la cathédrale, "la Torre del Aminar", au fond du "Jardin des Orangers".

- Au début du Xe siècle, au temps de la splendeur califale, al-Hakam II reprit la démarche de ses prédécesseurs en repoussant une fois encore le mur sud-est (celui de la qibla et du mihrâb) afin d'ajouter une surface un peu supérieure à celle de la première construction afin d'affirmer sa suprématie sur Damas. A la construction participèrent des artistes chrétiens de Byzance et l'empereur de Byzance offrit même des mosaïques pour le mirhâb. C'est celui-ci qui est toujours visible. Un véritable joyau tout d'abord par sa porte en arc outrepassé formée de pierres colorées délicatement gravées de motifs floraux. Joyau également par sa coupole surmontant une frise formée d'arcatures tréflées. Les colonnes sont signée par les artisans qui les réalisèrent et portent un discret signe distictif supplémentaire, un croissant ou une croix.

- A la fin du même siècle, le gnénéral al-Mansur (le Victorieux) augmenta encore la superficie de la mosquée, cette fois latéralement (puisqu'il ajouta 8 nefs aux 11 initiales) et de la cour (le sahn). De ce fait,
le mirhâb conservé de la période précédente n'est pas du tout centré. Dans cette phase, l'édifice s'est accru d'un peu plus de 40% de sa surface. Cette extension sert à affirmer le pouvoir califale finissant mais est effectuée à moindres frais. Les arcs ne sont plus qu'en briques peintes en deux couleur (brique et blanc).
C'était le chant du cygne du califat qui allait éclater en royaumes rivaux (les taifas).

Au final, la mosquée comporte 19 nefs de 11 m. de haut. A l'apogée du califat, la ville comptait 500 000 habitants et la mosquée pouvait contenir plus de 20 000 fidèles.


Après la "Reconquista", la prise de possession de l'édifice fut progressive. En 1236, création de la Chapelle de Villaviciosa sous le lanterneau d'Abd Al-rahman II; elle fut bientôt prolongée pour faire une première cathédrale en supprimant une vingtaine de colonnes. Puis au XIIes., création de la Chapelle Royale.

C'est au XVIe siècle, qu'une grande cathédrale prit place au beau milieu de la forêt de colonnes de la mosquée
, tandis qu'une tour baroque du XVIIe siècle englobait l'ancien minaret. Ce que nous voyons aujourd'hui.
Pour cela quelques 70 colonnes furent suprimées. Pour rappeller les églises de la Renaissance, en s'inspirant de la Chapelle Sixtine, il fallait aussi donner de la hauteur à un édifice qui était plutôt bas et sombre à l'origine, en élevant une voûte sur des murs surélevés et percés d'ouvertures.
Au sanctuaire, choeur et transept, il faut ajouter la création de trois chapelles.
Lorsqu'il découvrit le travail des architectes, l'empereur Charles Quint fut très mécontent et on le comprend. "Vous avez détruit ce que l'on ne voyait nulle part pour construire ce que l'on voit partout". Etonnant discours de la part de ce grand souverain qui ne sut pas ailleurs (palais gothique dans l'Alcazar de Séville, palais de l'Alhambra de Grenade) retrouver le charme de l'architecture mudejar qu'avaient si bien su apprivoiser ses prédécesseurs.

Pour bien marquer le changement, l'axe du sanctuaire catholique est perpendiculaire à celui de la mosquée, c'est-à-dire orienté en direction du nord-est. Presque logique puisque les directions symboliques de La Mecque et de Jérusalem ne coïncident pas!



Dans un contexte où de plus en plus d'immigrés de culte musulman sont présents dans le pays (800 000), des revendications se font jour (par la voie de Mansur Escudero, président du Conseil islamique d'Espagne) non pour une réaffectation au seul culte musulman mais à une sorte de partage oecuménique avec les catholiques...




Les quartiers les plus anciens de Cordoue, constitués de ruelles étroites, abritent des maisons aux murs blanchis à la chaux et des patios colorés caractéristiques des cités maures.


CORDOUE - dans le quartier de la Judería


Nous allons parcourir l'ancien quartier juif, la Judería.

Les Juifs arrivés en Espagne au IIe s. persécutés par les Wisigoths seront tolérés par les Omeyades musulmans (pas d'impôts particuliers) mais seront moins bien traités par la suite, surtout par les chrétiens (pillages au XIVe s.) après la Reconquista (certains avaient pris parti aux côtés des musulmans) et ils finiront même par être expulsés en 1492.

Autour de la place
Maimonide
Maimonide est un philosophe, juriste et médecin juif du XIIe s. Né à Cordoue et, par la suite, exilé au Caire où il sera le médecin de Saladin Ier. C'est un contemporain d'une autre célébrité de la ville, le philosophe, théologien, juriste et médecin arabe Averroès, également Cordouan jusqu'à son exil semi-volontaire à Marrakech..
Autour de la place
s'étend un quartier de ruelles blanches blanches aux murs fleuris.
Les portes des maisons s'ouvrent sur des patios frais aux grilles ouvragées. L'animation est apportée par quelques bars et restaurants.

C'est l'heure où nous voyons de belles andalouses se rendre en habits traditionnels à la feria qui se déroule au sud de la ville. Elle se signale par un gigantesque décor de carton pâte inspiré de la mosquée-cathédrale!


CORDOUE - la Fería


Puis c'est à regret le départ en direction du sud-est, vers Grenade, distante d'environ 160 km.

En quittant la vallée du Guadalquivir, c'est un paysage ondulant dont l'altitude grimpe vers les 600 m avec des céréales presque déjà presque mûres (les chaumes sont brûlés sur place à la fin de l'été) et un peu de tournesol.
Puis les oliveraies deviennent de plus en plus nombreuses sur des sols virant au rouge.

L'huile d'olive


L'olivier fut introduit dans la péninsule ibérique par les Phéniciens. La vigne également présente en Andalousie n'est que marginale avec 2% des surfaces agricoles.

Chaque olivier produit environ 12 kg de fruits (soit 3 litres d'huile extra-vierge). Certains arbres sont millénaires et ils repoussent si l'on a dû les tailler en raison du gel. La plus grande productivité correspond à des arbres âgés de 20 ans à un siècle.
On compte plus de 200 variétés mais ce n'est pas ce qui détermine la couleur du fruit mais le stade de la maturité lors de la récolte (entre novembre et janvier, plus tard en montagne). Les premiers fruits récoltés verts tandis que les fruits laissés encore un mois de plus deviennent noirs. Ils sont destinés à l'apéritif (10% de la production).Si on les récolte encore une semaine ou deux plus tard, ils sont frippés mais juteux, parfaits pour le pressage de l'huile.

En 1996, la production était de 5 millions de tonnes grâce aux aides communautaires à la plantation. Les primes ayant été supprimées en raison d'excédents, la production est tombée à 1,5 million de tonnes (arrachage des arbres). Le quart de la productionest exporté vers l'Italie qui commercialise le produit comme s'il s'agissait d'un produit du pays!

A la suite de scandales concernant des huiles frelatées (décès) commercialisée en Castille, un organisme de contrôle de lla qualité des huiles d'olive veille sur toute la chaîne de production.

Il faut distinguer 3 catégories d'huiles d'olive
- la moins chère etla plus consommée comporte seulement 10 à 15% de pur jus, le reste étant constitué d'huile lampante sans grande saveur et plus acide obtenue à partir du pressage de la peau et du noyau du fruit (toxique).
- l'huile vierge avec 50 à 55% de pur jus
- l'huile extra-vierge, douce et exclusivement faite de pur jus.

Pour obtenir un litre d'huile d'olive extra-vierge, il faut de 4 à 5 kg de fruits.

Dès le petit déjeuner, les Espagnols consomment volontiers une tartine copieusement arrosée d'huile d'olive!

Nous passons près de Banea, petite localité installée dans un superbe site de colline sur les pentes de laquelle dégringolent des maisons blanches vers la vallée du Río Guadajoz. Le tableau est réhaussé de quelques touches plus chaudes dues à la couleur des toits couverts de tuiles et aux clochers qui émergent ici ou là au-dessus des pentes de couleur vert sombre des oliveraies.
La localité est également célèbre pour sa production d'huile d'olive qui bénéficie d'une appellation contrôlée parmi les plus prisées.

Pour notre part, nous nous arrêterons faire provision du précieux liquide un peu plus loin, à Luque, localité qui se trouve également dans la première région au monde pour la production d'huile d'olive! Dans un genre far-west, une ancienne gare désaffectée sert de bar et de magasin de vente.

L'altitude continue de croître. Les petites villes de Alcaudete et de Alcala la Real près desquelles nous passons se situent vers les 900 m. Nous arrivons à un col où brusquement surgissent au loin les sommets enneigés de la Sierra Nevada qui porte bien son nom et qui ferment l'horizon vers le sud. Son point culminant, le Pic de Mulhacén avec 3477 m dépasse le Pic d'Aneto (3404 m dans les Pyrénées).

En approchant de Grenade, on voit beaucoup de cultures maraîchères ainsi que de la maïsiculture (2 à 3 récoltes par an). Jusqu'au début du XXe s., la région était spécialisée dans la betterave sucrière (sur la Costa del Sol, on cultivait alors la canne à sucre) et le tabac.



Sur l'autre chaussée de l'autoroute par laquelle nous pénétrons dans Grenade, nous apercevons les "caravanes" (plutôt des chariots et remorques bizarrement customizés) de Gitans.
Pour les tirer, ils ont troqué les tracteurs contre les chevaux. Ils se rendent au pélerinage de la Vierge du Rocio, grand rassemblement gitan qui se déroule chaque année dans la région et dont le point d'orgue est le lundi de la Pentecôte...


Le soir venu, autre spectacle peu banal, des réceptions et banquets sont donnés dans notre hôtel à l'occasion de première communion et de mariage. C'est l'occasion de voir la débauche vestimentaire à laquelle se livre les Andalous et surtout les Andalouses aux robes toutes plus chic les unes que les autres. La belle-mère de la noce se remarque à sa mantille...
Eric nous explique que, pour être à la hauteur lors de grandes cérémonies, les familles andalouses vont jusqu'à s'endetter. La fierté espagnole et encore plus la fierté andalouse ne sont pas de vains mots!



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ANDALOUSIE